UPFing06 : L’entrenet, et demain ?

La session de clôture souhaitait donner la parole à des acteurs, pour terminer sur des bonnes pratiques et des exemples qu’il était important d’emporter par devers soi. Ce fût le cas de Michel Briand (vidéo), élu à la ville de Brest, qui nous a raconté les avancées et les difficultés de son expérience menée sur un territoire local. Une expérience assez unique d’accompagnement des usages et des pratiques : développement de l’écrit public, démultiplication des projets et des sites participatifs… Le cas brestois est en tout cas la preuve que l’accompagnement et la médiation, pour autant qu’ils prennent en compte le temps long, fonctionne. Aujourd’hui, à Brest, les outils d’expression personnelle et de production collective sont réellement des vecteurs du lien social.


Michel Briand, interviewé par Jean-Marc Manach, durée 2’20

Chris Messina a présenté le concept des BarCamps, des espaces créatifs de rencontre qui se démultiplient un peu partout sur la planète depuis un an où tous les inscrits sont participants. Quand on est habitué aux conférences classiques, le concept a de quoi dérouter : on fixe une date et on ouvre un wiki ; le lieu se trouve parfois plus tard ; les gens s’inscrivent non pas à partir d’un programme (qui n’existe pas), mais en indiquant ce dont ils voudraient parler, ce qu’ils voudraient présenter. Sur place, chacun commence à se présenter, puis on commence à construire le programme : sur le mur, une grille de créneaux horaires et de salles numérotées, sur laquelle chacun inscrit sa proposition. Des discussions s’organisent ainsi par petits groupes, autour de projets ou de propositions concrètes. Au bout d’une heure, tout le monde se retrouve autour du tableau commun, pour proposer ou choisir une nouvelle discussion.

Né dans le cadre de rencontres de programmeurs, en réaction aux FooCamps d’O’Reilly désormais considérés comme trop sélectifs, le concept se décline de multiples manières : certains Camps produisent des bouts de logiciels, d’autres des projets humanitaires ou militants, d’autres encore des concepts d’entreprises. Quoi qu’il en soit, le résultat est plutôt probant, comme le démontrent les retours après le premier BarCamp parisien organisé le 10 juin dernier.


Chris Messina, interviewé par Mickaël Raybaud, en anglais, durée 8’00.

Christophe Aguiton (vidéo), de France Télécom R&D, a clos la session en soulignant la rupture que représente l’EntreNet. « Il ne faut pas penser que l’Entrenet est un entre-deux où les choses sont en clair-obscur… Nous sommes bien là face à une rupture majeure qui se voit par le nombre d’innovation et leur caractère cumulatif et par l’imbrication entre les outils, les services et les usages sociaux qui sont eux-même cumulatifs. »

Néanmoins, la France n’est pas la Californie et les rythmes d’appropriation seront différents. On ne peut pas se contenter de généraliser au monde entier ce qu’il se passe à San Francisco, où le mouvement contestataire a toujours été très présent, où la masse critique de développeurs est telle qu’il y a forcément une créativité qu’on ne retrouve nulle part ailleurs dans le monde – sans compter qu’il y a là-bas une accoutumance à l’usages des médias sociaux, qui s’y sont installé depuis longtemps, comme le montre le succès du site de petites annonces CraigList. En France, les outils sociaux balbutient encore et l’avance cumulative de leur utilisation prendra certainement encore beaucoup de temps, comme l’a bien montré Michel Briand.

Il y a pourtant, selon Christophe Aguiton, une rupture dont il faut interroger la nature. Une rupture culturelle entre la première vague du web des années 90 et celle d’aujourd’hui, marquée notamment par la montée du logiciel libre comme idéologie et comme pratique. Une rupture technologique aussi, non pas majeure, mais qui pose encore de vrais défis de recherche, par exemple celui qui consiste à visualiser et comprendre les dynamiques des réseaux sociaux, comme s’y attelle le projet Autograph. Mais la rupture est surtout dans les usages et les services. Une rupture qui présente au moins trois défis à la recherche :

  • l’innovation se fait désormais sur des circuits infiniment plus courts que les circuits traiditonnels, ce qui pose des problèmes dans les chaînes de décisions des entreprises ;
  • l’innovation nécessite de réelles approches croisées, multidisciplinaires allant des experts (sociologues, d’économistes, de gens du marketing ou d’ergonomes) aux innovateurs ;
  • l’innovation est beaucoup plus coopérative.

« L’économie des services web est très particulière par rapport aux services traditionnels des industriels. Si on sait rattraper très rapidement des innovations techniques majeures, c’est beaucoup plus difficile dans les services web. Celui qui casse le modèle, prend le monopole et souvent pour longtemps : il faudra trouver une vraie rupture majeure pour défaire Google. Et les applications web sont souvent comme ça, comme le montrent aujourd’hui Technorati ou Del.icio.us. Heureusement, dans les médias sociaux, il y a des différentiations culturelles, par nature, qui permettent à des Skyblogs d’exister par rapport à MySpace par exemple… Mais il y a là un enjeu de réflexion important, qui doit interroger notre rapport à l’innovation. »

Alors que peut-on faire ensemble ? « Je crois qu’aujourd’hui, il y a surtout des initiatives à prendre, comme le font Michel Briand à Brest, Chris Messina et les BarCamps. C’est notamment l’objet d’Overcrowded, qui propose aux acteurs de l’innovation d’échanger sur les mutations – observées, subies, vécues ou désirées – des processus d’innovation en réseau et de construire ensemble le cahier des charges d’un consortium qui pourrait les associer dans des actions communes. »

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0 commentaires

  1. C’est juste un petit problème d’encodage Olivier… Mais en lançant la vidéo, c’est vraiment lui et non pas Christophe Ducamp. Nos excuses aux deux.