Olpc : la fin de l’innovation éducative  ?

Nicholas Negroponte, le promoteur de l’organisation un ordinateur portable par enfant (One Laptop per child, Olpc) vient d’annoncer officiellement que Windows équipera de prochaines versions de son ordinateur. Selon Negroponte, la compatibilité avec le système d’exploitation de Microsoft devrait permettre d’ajouter de la crédibilité au projet. « Quand vous dites aux gens que nous pouvons y faire tourner Windows, ils sont très impressionnés. Cela nous permet de passer une sorte de test de virilité », plaisante Negroponte.

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Pour autant, les critiques sont assez dures. Pour Matt Asay, éditorialiste et défenseur de l’open source à Cnet, reprenant la critique politique de Richard Stallman, l’Olpc ne « va pas libérer les Nations de leur statut vassalique ». Selon Stallman, l’échec de l’Olpc est surtout à mettre au compte de Negroponte, qui, contrairement à Linus Torvalds, n’a pas réussi à construire une communauté autour de son projet.

En acceptant que les ordinateurs puissent embarquer un système d’exploitation Windows, au-delà de ce que cette annonce semble dire (que l’open source n’est toujours pas mûre pour faire tourner des ordinateurs, alors qu’il équipe et continuera d’équiper l’une des versions de l’ordinateur, une version solide, qui fonctionne et qui donne largement satisfaction d’ailleurs), il semble tout de même que ce soit le rêve de l’Olpc lui-même qui vienne se fracasser contre la réalité. Selon Bruce Nussbaum, éditorialiste à BusinessWeek, la décision marque la fin de l’idée d’apporter la pédagogie construtionniste (« apprendre en faisant », chère à Piaget) aux millions d’enfants pauvres de par le monde. Car c’était bien là la quintessence éthique du projet : parvenir à dépasser les professeurs, les parents et les établissements d’enseignement pour promouvoir l’auto-apprentissage. « Le but originel de l’Olpc était d’utiliser des logiciels open source pour connecter les enfants directement les uns les autres et au web afin qu’ils puissent apprendre les uns des autres depuis plusieurs sources d’information », comme l’explique Ivan Krstic, l’architecte logiciel de l’Olpc sur son blog (via l’excellent Olpc news). C’était le coeur de la théorie éducative de Seymour Papert : l’ouverture ! Comme le disait Nicholas Negroponte il y a quelques mois, alors qu’il était déjà en discussion avec Microsoft : « Il serait difficile pour l’Olpc de dire qu’il est ouvert et ensuite de le laisser fermer par Microsoft. Ouvert veut dire ouvert. »

« Reste que depuis le début du projet, l’Olpc était un projet occidental encapsulé dans un superbe petit ordinateur conçu par des occidentaux pour des enfants, des cultures et des systèmes éducatifs non occidentaux », critique Bruce Nussbaum. Les ministères de l’éducation indien ou chinois ne s’y étaient pas trompés quand ils avaient vus dans l’Olpc un défi à leur autorité – ou plutôt un moyen pour rendre leur système éducatif « conforme aux idéaux d’apprentissages de l’Occident » – et lancé des initiatives pour développer leurs propres ordinateurs éducatifs à bas prix.

Bien sûr, l’Oplc a toujours été complimenté pour sa technologie et sa conception, rarement pour sa conception de la pédagogie qui sous-tend le projet. « Mais c’est la pédagogie qui a toujours été au coeur de l’expérience et c’est la pédagogie, en fin de compte, qui s’est révélée insupportable aux gouvernements parce qu’ils s’en ressentaient insultés et défiés », rappelle encore Bruce Nussbaum.

L’éditorialiste en conclut que toute innovation, aussi belle soit-elle, doit être adaptée au contexte et à la culture. « Elle a besoin de s’intégrer et non être imposée. »

Reste à savoir si en s’associant à Microsoft, l’Olpc deviendra un ordinateur portable bon marché comme un autre, comme semble le promettre les Cassandres. Olpc espérait vendre 100 à 150 millions d’ordinateurs à la fin de 2008 : ils n’en ont distribué pour l’instant que 600 000 exemplaires. On verra si la version Windows permet de renverser la tendance.

Mise à jour : Nicholas Negroponte vient de dévoiler les détails du modèle de seconde génération de l’Olpc qui devrait être commercialisé en 2010, à mi-chemin entre le livre électronique et la tablette tactile multitouch. Via Aïe-Tech.

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0 commentaires

  1. Olpc : Faire faire pour faire comprendre ?

    L’ouverture (ou la fermeture) de L’OLPC a Windows sonne t’elle la fin de l’aventure de la machine, la mort d’une plateforme d’innovation pédagogique ou n’est-elle qu’un avatar de plus dans les relations entre pouvoir, politique et éducation ?
    Faire faire pour faire comprendre…
    L’ordinateur quelque-soit son système d’exploitation est une machine faite pour donner une forme de liberté et de pouvoir aux gens sur leur apprentissage et leur vie. Linux, Windows ou Mac OS, finalement quelle importance. Une plate-forme indépendante des OS, n’est-ce pas la véritable liberté. Devenir des selfs learners, puis des self-broadcasters, et peut être des self manufacturer passe par la maitrise des outils et des logiciels, qui sont plus importants que la plateforme au final, que le sectarisme lié a tel ou tel OS. Ecosytem is King.

    L’OLPC est une machine produite par des Occidentaux pour les autres pays dits émergents. Éternel écueil dans les écoles de design, pleines de bonnes intentions (spécifiquement à l’ENSCI). Ces bonnes intentions qui sont louables ne font pas toujours de bon projet. L’histoire, la politique, l’identité, les cultures, les équilibres et les orgueils nationaux s’en mêlent souvent. NegroPonte a néanmoins eu raison de faire ce projet. Peut-être le design du très mondain Yves Behard n’est pas le plus cohérent, mais pour le reste, la machine est formidable. Son OS, sa gestion de l’énergie, son réseau sans fil en mode infrastructure sont remarquables. Il n’y a pas de solution simple, car tout le monde est toujours le suspect de quelqu’un ou de quelques choses. la Fondation de Bill Gates ne pouvait pas militer pour Linux. Les Chinois ou les Indiens ont leur propre déterminisme.

    Le véritable problème et Bruce Nussbaum le soulignent très bien est que la pédagogie est liée à une culture et un système politique. Plus que l’auto apprentissage qui n’est pas a nié dans se type de dispositif, c’est le faire faire pour faire comprendre (Learning by doing) qui est surtout enjeu dans ces questions d’OS. Célestin Fresnet a mis au point ses théories à partir d’un outil qui a bouleversé l’école : le manuel scolaire. Il a donc inventé la pédagogie de cet outil. Il est moins connu que Piaget, car son approche est issue du contexte français (réticence, etc…..) mais son travail est marquant et de référence sur ces sujets. Des pionniers comme Itard, Seguin, Montessorri, Decroly (éducation des sourds Muets) serait aujourd’hui considéré comme suspect s’il allait en chine. On peut même dire qu’ils sont suspects en France au vu des dernières déclarations du ministre de l’Éducation nationale

    Linux qui est une utopie concrète porte en son sain, ces limites: absence de culture de l’usage, des couches utilisateurs, et esprit sectaire parfois, mais sa capacité a se transformer est sa principale qualité. Je ne défendrais pas plus Windows qui exprime une force qui conduit à son rejet.

    Ce qui nous rassemble, c’est une culture humaniste, une culture du dessein, et l’envie de rendre ce que nous avons reçu. Les modalités restent à inventer. Le débat, c’est effectivement ce que l’on peut faire de la machine. Il existe une quantité de logiciels multiplateformes qui permet de faire et de produire gratuitement: Processing, en est un exemple.

    Au final, Windows sera un cheval de Troie, car il est utilisé dans beaucoup de pays et un standard du monde industriel et économique. La solution pour déployer ce type de plate-forme est peut-être dans leur organisation. Il est peut-être de mettre en place une logique de faire faire pour faire comprendre « learning by Doing » au niveau des coopérations internationales.
    Une autre question m’interpelle, qu’elle serait la réaction en France si l’on équipait les écoles de cet ordinateur, quel que soit son OS ? ;=))))))

  2. Moi j’pense que c’est surtout une histoire de pognon tout ça.
    Comme le marché de l’industrie informatique arrive a saturation, les grosses compagnies ont trouvé ici un moyen de faire du soit disant humanitaire en se faisant financer par les gouvernement la production de ces machines.

    Je pense qu’avec cet argent, on devrait pouvoir monter de réels projets éducatif pour ces pays. Mais ça ne passe surement pas par l’achat d’un ordinateur portable.
    Ça me parait vraiment ridicule.
    Autant pour les étudiants qui vont à l’université dans des pays qui n’ont pas les moyens d’avoir de tels équipements ok. Mais pour des enfants…j’vois pas trop quel intérêt pédagogique il peut y avoir.

  3. Avant de commenter plus loin, je conseille à tout le monde de lire la mise au point très claire de Nicholas Negroponte sur cette affaire.

    « Message from Nicholas to the community lists »:
    http://wiki.laptop.org/go/AnnounceFAQ

    Premièrement, Negroponte ne dit pas un seul instant que l’open source n’est pas mûr pour faire tourner les ordinateurs. On a pu lui prêter ici ou là un agacement sur le retard pris par certaines fonctionnalités, mais jamais il n’a remis en cause le fait que l’énergie dépensée par OLPC allait vers le libre. Ici, toutes les présentations parlent de libre, et ce n’est pas seulement un effet de « culture locale ».

    Ensuite, je ne comprends pas bien en quoi le fait que Microsoft puisse installer Windows XP — ils y travaillent depuis plus d’un an — sur des machines fabriquées par OLPC « ruine » le projet d’apporter la pédagogie constructiviste aux enfants des pays pauvres. Une partie de cette pédagogie est entre les mains des enseignants, une autre réside dans le software (Sugar) et une autre dans la machine (le XO.) Évidemment, c’est mieux si tout marche ensemble. Mais permettre à Windows d’être installé sur un XO et faire tourner Sugar sur le XO est une autre manière de faire tourner les choses ensemble. Comme dit Negroponte dans sa mise au point, le but de cet accord avec Windows est de convaincre plus de pays d’utiliser le XO et c’est une opportunité potentielle de déployer Sugar encore plus largement. OLPC n’investit ni dans le support de Windows sur le XO, ni dans le portage de Sugar sur Windows, OLPC n’investit que dans du libre.

    L’article dit, citant Ivan « Le but originel de l’Olpc était d’utiliser des logiciels open source pour connecter les enfants directement les uns les autres et au web afin qu’ils puissent apprendre les uns des autres depuis plusieurs sources d’information »

    Mais cette citation est douteuse : le but d’OLPC a toujours été pédagogique. Développer une solution en open Source, c’était accorder le modèle de développement au modèle pédagogique constructioniste, lui-même centré sur la collaboration. Mais le but d’OLPC n’a jamais été d’utiliser de l’open source avant tout! D’ailleurs, c’est dans le même billet d’Ivan qu’on comprend cela – il faut le lire en entier.

    Une remarque : ne soyons pas fétichiste avec les mots. « Ouverture » est-ce que ça veut dire fidèlité à la vision du logiciel libre défendue par la Free Software Foundation, ou bien est-ce que cela signifie qu’on laisse quelqu’un d’autre déployer son système d’exploitation sur le XO ? Comme les mots « libre » et « ouvert » se prêtent à plusieurs usages, chacun veut tirer la couverture à soi et se crispe sur l’une ou l’autre des acceptions. Et si chacun a le droit de vouloir aller où il veut, personne n’a le monopole du sens des mots.

    Il est dit à un moment qu’OLPC risque d’être « fermé » par Microsoft. C’est un non-sens, et le raisonnement sous-jacent est assez primitif: contact avec l’entité Microsoft (quel qu’il soit) donc contamination idéologique, et condamnation pour cause de « fermeture » (on ne voit pas très bien ce que cette fermeture signifie, d’ailleurs…) Ce n’est pas très raisonnable.

    OLPC c’est trois choses : une machine (XO et XO-2), un environnement d’apprentissage (Sugar), un effort de déploiement de ces machines dans les pays pauvres. C’est beaucoup ! Et ce n’est pas de laisser à Microsoft la possibilité d’installer son logiciel qui va réellement changer l’ampleur du défi.

    Concernant les indiens et les chinois, ils n’ont pas réagi à une forme quelconque d’impérialisme pédagogique occidental (dont le XO-libre aurait été l’emblème), mais à l’opportunité d’un nouveau marché.

    Le XO ne sera jamais un simple ultra-portable, parce qu’OLPC s’intéresse d’abord à la pédagogie. Si jamais l’environnement Sugar est porté sous Windows et que tous les ultra-portables se mettent à donner accès à Sugar, alors le boulot d’OLPC continuera.

  4. Tout à fait d’accord avec Bastien !! Comme évoqué sur plusieurs autres blogs, évoquer « le choix d’intégrer M$ » comme une remise en cause des enjeux pédagogiques ressemble a de la désinformation !

    Ok, l’intégration d’un OS M$ est contraire avec un des principes initial du projet (Full Open Source Solutions) mais ce choix est certainement justifiable. Ok on peut en débattre et s’en plaindre histoire de faire du bruit et de sensibiliser l’opinion publique.

    Pourquoi la présence d’un OS M$ ne permettrait pas « de connecter les enfants directement les uns les autres et au web afin qu’ils puissent apprendre les uns des autres depuis plusieurs sources d’information” ? Pourquoi donc ? Expliquez-nous vous qui semblez avoir compris le sens de cette affirmation ?

    Sur un autre axe, dire « je promeut l’OPEN SOURCE » n’implique pas « je refuse ce qui ne l’est pas » … être ouvert, c’est peut-être aussi ne pas être fermé à la différence, non ?

    Pour ma part, la réaction ne doit pas se faire en occident mais dans les pays qui recevront ces ordinateurs. Il suffirai de sensibiliser leur utilisateur sur la possibilité de désinstaller l’OS non désiré pour clore le débat. Mais tout comme M$, l’occident aime bien parler et faire parler de lui, alors plutôt que de se préoccuper des intérêts des utilisateurs finaux, on fait du bruit pour servir les notre et défendre nos valeurs. On fait donc pas mieux que M$ et les perdants sont bien toujours au Sud.

  5. Il me semble que l’environnement d’apprentissage ouvert (Sugar) (l’interface graphique qui équipe l’Olpc) n’était pas seule en cause dans le projet pédagogique de l’Olpc (l’Olpc ne se résume pas à Sugar, qui est venu en cours de route). Le fait que le système soit modifiable (en open source), à mon avis, participait de l’idéal de cette pédagogie, de dire que tout dans cet ordinateur était accessible, reconfigurable, que l’on pouvait voir le code et le modifier.

    Mais comme le souligne Bastien en citant Ivan, cette concordance entre le but (pédagogie) et les moyens (open source) est venue de leur concordance elle-même.

    Ne rêvons, cela ne veut pas dire que l’Olpc sous Linux était accessible à tout le monde, et certainement que proposer une version Windows va aussi faciliter de nouvelles appropriations.

    Je suis assez d’accord avec Jean-Louis Fréchin pour renvoyer dos à dos Linux et Windows, chacun avec leurs excès. Mais au final, il me semble que petit à petit, l’Olpc adapte les ambitions de son projet pédagogique, et les contradictions du discours de Nicholas Negroponte me paraissent de ce côté là, tout de même parlante.

  6. Merci de votre réponse. Vous confirmez donc que la présence d’un OS M$ permettra “de connecter les enfants directement les uns les autres et au web afin qu’ils puissent apprendre les uns des autres depuis plusieurs sources d’information” et vous ajoutez même une nouvelle information : « Ne rêvons, cela ne veut pas dire que l’Olpc sous Linux était accessible à tout le monde, et certainement que proposer une version Windows va aussi faciliter de nouvelles appropriations. »

    Autrement dit, le but pédagogique n’est pas remis en cause … et on pourrai même penser que l’intégration de M$ va permettre de toucher plus de monde et va simplifier la prise en main de l’ordinateur. Au départ l’article critique M$ et au final, il reprend les arguments de M$ (convivialité). Il n’y a pas que l’Opcl qui s’adapte … LOL

  7. Non, Ocarbone ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit.

    J’ai renvoyé dos à dos Linux et Windows et je ne suis pas sûr, personnellement que Windows soit un OS convivial, ni une seule seconde qu’il va simplifier la prise en main de l’Olpc, par les utilisateurs en tout cas. Au final, vous faites vous une comparaison entre l’un et l’autre, alors que je ne crois pas que c’était le sujet de ce billet qui traitait plutôt des limites de la culture libre.

  8. Le débat que vous avez est très valable dans les pays occidentales. Mais pas dans les pays dans lesquels sont commercialisés ces PC.
    Vous me paraissez un peut à côté de la plaque au niveau des ^besoin pédagogiques dans ces pays.
    Vous croyez vraiment que c’est de portables qu’ils ont besoin ? il n’ont même pas de livre ! ni de repas à la cantine le midi ! Il y a des classes de 50 élèves avec des professeurs qui font tout leur possible sans en avoir les moyens. Avec des infrastructures pire que nos animaleries et vous pensez qu’en gaspillant 200$ par élève sur 5 ans (durée de vie de l’OLPC) ça va résoudre les problèmes parce qu’il est équipé d’un OS Open-Source ?

    Je pense qu’on est un p’tit peu à côté du débat là. Je dis pas que vos commentaires sont dénués de sens bien au contraire, je rejoins beaucoup d’avis sur le potentiel de partage des savoirs, de la connaissance, et de l’apprentissage des plates-formes open-source. Mais les pays pauvres sont loin d’être dans cette problématique là.

  9. C’est bien vous qui avez écrit « Ne rêvons, cela ne veut pas dire que l’Olpc sous Linux était accessible à tout le monde, et certainement que proposer une version Windows va aussi faciliter de nouvelles appropriations. » ??

    De plus si « le sujet de ce billet qui traitait plutôt des limites de la culture libre. » … pourquoi parlez-vous d’éducation ??

    Je ne fait que relever les incohérences de vos propos, je ne penses pas les avoir déformés.

    Par contre, il est possible que ce post ne reflète pas exactement votre pensée. Mais là je n’y peux rien, je n’en suis pas l’auteur

    LOL à nouveau.

  10. Pardon, a aucun moment en effet vous ne dites « que la présence d’un OS M$ permettra de connecter les enfants directement les uns les autres et au web afin qu’ils puissent apprendre les uns des autres depuis plusieurs sources d’information”.

    C’est peut-être le sens de votre « ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit » ?

    Vous ne l’avez en effet pas dit, mais vous n’avez pas répondu à la question « Pourquoi la présence d’un OS M$ ne permettrait pas de connecter les enfants directement les uns les autres et au web afin qu’ils puissent apprendre les uns des autres depuis plusieurs sources d’information ? »

    Qui ne dit mot consent. Votre absence de réponse m’a amené à croire que vous n’aviez aucune réponse valable … si je me trompe, je serai heureux de prendre en considération vos explications !

  11. Parce que l’Olpc montre que faire passer la culture du libre (et derrière elle la pédagogie constructiviste, dont elle s’inspire en partie) du monde du logiciel à celui de l’éducation, n’est pas si simple.

    Un OS Microsoft permet autant aux enfants de se connecter les uns avec les autres, et au web. Mais si j’ai bien compris les propos d’Ivan Krstic, il pensait que la collaboration devait se faire dans un environnement qui le permettait totalement (de la modification du hardware jusqu’à la modification du code).

  12. Votre dernière réponse me laisse sur ma faim … je pensai pourtant que vous aviez des arguments valables mais que vous ne les aviez pas exprimé.

    Le constructivisme n’est pas en soi une démarche pédagogique. C’est une règle de l’apprentissage humain, qui dit que tout apprentissage passe par une activité mentale du sujet, une activité de réorganisation du système de schèmes et de connaissances existant. Sans cette activité, invisible mais intense, aucun élément nouveau ne peut être intégré.

    Faire le lien avec l’intérêt de modifier du code ou du hardware et vraiment tiré par les cheveux … et allez jusqu’à établir une lien direct la culture du libre … c’est vraiment farfelu.

  13. @ocarbone: ‘Le constructivisme n’est pas en soi une démarche pédagogique’ -> bien sur que si, et ça consiste en premier lieu à avoir une certaine confiance dans les capacités d’apprentissage de l’apprenant, si on doit raisonner en termes de transmissions de savoirs, et par corollaire, à ne pas nier chez l’autre sa capacité à détenir une vérité, même contradictoire.

  14. et vu comme ça, l’anti-constructionnisme pédagogique est une instanciation possible du constructionnisme.

  15. Une petite réflexion encore, qui n’a rien à voir avec la bataille Linux Windows. Juste pour comparer le piètre succès de l’Olpc à celui de l’ultra-portable d’Asus (pourtant plus cher).

    C’est à croire que l’ordinateur à but, « l’ordinateur dédié » (pédagogique pour l’Olpc, simplifié pour les ordinateurs destinés aux seniors) arrive moins bien à trouver sa place que l’ordinateur classique, autonome ou « complet ». Il faudrait nuancer cette intuition du fait que la commercialisation des ordinateurs dédiés n’est pas la même que celle des ordinateurs classiques… Mais cela donne peut-être un crédit supplémentaire à l’intuition de Daniel Kaplan de dire que Simplifier n’est pas entraver (même si le but de l’Olpc, n’était pas du tout d’empêcher les usages, au contraire…). A creuser.

  16. Attention à ne pas confondre OLPC, XO et Sugar. OLPC est le nom du projet, pas de la machine. XO est le nom de la machine, pas de l’ensemble des logiciels qui tournent dessus. Sugar est le nom de la plateforme logicielle faisant tourner les activités (logiciels.) Peut-être que le « PC » d’OLPC est un peu trompeur… mais c’est important de ne pas parler d’OLPC comme s’il s’agissait de la machine.

    L’argument « Il leur faut du pain, pas des ordinateurs. » est faux et éculé. Derrière lui, il y a une vision très pauvre des pays en voie de développement. Ce sont des pays où il y a de graves inégalités, pas des pays où il n’y a rien. Et changer l’éducation, c’est non seulement un besoin à court terme mais aussi un pari à long terme.

    Je ne crois que l’enjeu soit le rapport entre le libre et l’éducatif ; je dirais que dans cette affaire OLPC/Microsoft, il s’agit plutôt des rapports entre le XO (la machine) et la liberté que les gouvernements réclament (grâce au lobbying de Microsoft, pas de doute) de pouvoir installer Windows.

    La collaboration est un problème pédagogique, pas un problème technique. On peut connecter tous types de machines et de systèmes ensemble, libres ou propriétaires.

    Le constructivisme (et le socio-constructivisme) sont des mouvements pédagogiques. Ils reposent sur des théories qui insistent sur le fait que l’esprit apprend en construisant (d’où le nom de ces mouvements pédagogiques), mais ne confondons ni les théories sur l’apprentissage et les mouvements pédagogiques qui s’en inspirent.

  17. Je signale que N.Negroponte est l’auteur d’une installation historique que l’on peut retrouver un peu sous le nom de ‘SEEK’ et qui pose quelques fondements de la cybernétique, éventuellement à son insu.

  18. Bonjour à tous,
    Je suis du Burkina Faso en Afrique de l’ouest.
    Nous avons discuté du projet de l’OLPC sur notre liste de discussion qui regroupe des enseignants de notre pays intéressé par la question de l’intégration pédagogique des TIC.

    Je pense que l’idée est belle et intéressante. Mais nos réalités éducatives économiques et surtout culturelles constituent les principaux handicaps.

    Au niveau éducatif, notre priorité est l’élargissement de l’accès. Nous n’avons pas suffisamment de salles de classe pour scolariser nos enfants. Alors que pour utiliser un ordinateur il faut au moins savoir lire et écrire.
    En plus les effectifs sont insupportables. Nous avons plus de 100 élèves dans certaines classes.
    En fin qui va apprendre aux élèves à utiliser ces outils et avec quel contenu? Celui développé par les européens qui n’est pas en adéquation avec nos réalités sociales?

    Au niveau économique, la priorité de nos Etats dans le domaine de l’éducation c’est de construire suffisamment de salles classe, de former suffisamment d’enseignants et de mettre à leur disposition suffisamment de matériels didactiques dont les contenus sont en accord avec notre société et aussi et surtout en adéquation avec le profil de citoyen de demain propre à notre vision du monde de demain.

    Merci et à bientôt

  19. Bonjour,

    oui, il y a des réalités éducatives qui ont priorité sur le fait d’utiliser des XO à l’école. Mais il faut être sûr de bien savoir lesquelles : construire des classes pour alléger les effectifs est évidemment une priorité ; mais il y a de nombreux investissements qui coûtent plus cher que ne coûterait l’investissement dans un plan comme OLPC (livres, fournitures, etc.)

    Concernant les contraintes culturelles, il ne faut pas imaginer que le XO sera un « perfectionnement » de l’éducation là où il sera distribué : l’éducation (i.e. apprendre à lire, à écrire et à compter) se fera avec le XO. Celui-ci ne sera pas un gadget en plus pour les plus avancés.

    Au sujet des contenus, tous les pays qui adhèrent au programme sont justement en train de définir leurs propres contenus, et l’introduction du XO est souvent une chance de revivifier les cultures locales (en prenant en compte des questions comme le multilinguisme, par exemple.)

    Je suis parfaitement conscient qu’OLPC n’est pas et ne doit pas être un programme qui s’impose comme une évidence à n’importe quel pays : mais là où des pays volontaires s’y mette, il est surtout vu comme une chance de changement, comme un moyen d’obtenir des infrastructures, un renouvellement des méthodes d’enseignement, etc. Cette chance de changement n’est négligeable pour aucun pays, développé ou en voie de développement !

  20. Cela me rappelle que du temps que j’enseignais à l’école normale de Libreville, au Gabon, on me reprochait d’avoir organisé un ciné-club plutôt que d’avoir initié mes élèves au maniement du caméscope.

    Or, les écoles secondaires, à l’extérieur de la capitale, souvent n’avait même pas d’électricité. Mon directeur des études de l’époque faisait du colonialisme culturel sans s’en rendre compte. Faut dire qu’il sortait rarement du quartier des Blancs.

    J’ignore si l’OLPC est adapté à l’enseignement en Afrique. MAIS ce que je sais cependant c’est que ce n’est pas aux Occidentaux de porter ce jugement mais aux principaux intéressés, les enseignants africains.

  21. Bonjour à tous,
    je pense que le problème ne réside dans l’acquisition de l’OLPC Bastien.
    Qu’à cela ne tienne l’OLPC coute aujourd’hui plus cher qu’un livre de classe. 30 000 francs CFA suffisent à acquérir tous les livres de classes pour un élève.

    Mais le hic réside dans la mise en oeuvre et dans la pérennité de ce programme.
    – Dans la mise en oeuvre j’ai évoqué la question de contenus. A cela s’ajoute la question de la formation des enseignants aussi bien à l’usage des outils notamment des logiciels d’application qu’en pédagogie. Parce l’utilisation de ces outils modifient fondamentalement les approches pédagogiques. Mais actuellement nos pays n’ont pas suffisamment d’enseignant et aussi la question de la formation est problème réel. Chaque année au Burkina Faso plus de deux cents enseignants sont recrutés et envoyés directement sur le terrain sans formation de base. Avec quel moyen formé l’ensemble des enseignants pour une intégration de cet outil dans les activités pédagogiques.

    -Au niveau de la pérennité, quelle est la durée de vie d’un OLPC? la question d’acquisition des outils. L’OLPC est entrain de passé de linux à windows. Savez-vous que l’étape actuelle plus de 80% des logiciels qui sont utilisés dans mon et même dans l’administration comprise ne sont sans licence.

    -Je pense qu’il faut être prudent et ne pas s’engager dans une voie à issue incertaine. Je reconnais que le monde est aujourd’hui porté par les TIC et qu’il le sera encore davantage dans le futur. Aucun pays qui souhaite jouer sa partition dans ce monde ne peut faire fi de cette nouvelle donne. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut prendre tout ce qui tombe sous la main. Ce n’est pas parce qu’on est affamé qu’on doit manger tout ce qu’on reçoit sans prendre le soin de vérifier si c’est danger pour son organisme puis qu’on recherche la survie en s’alimentant.

    -Celui qui veut aider nos pays doit nous approcher et aller surtout à la base pour connaitre les besoins réels des bénéficiaires directs pour une réussite de son entreprise. Je suis l’un des pionniers dans le domaine de l’usage de s TIC dans l’éducation dans mon pays et je pense et je sais que ce n’est pas aussi facile qu’écrire parce que je vis les difficultés au quotidien.

    Merci et à bientôt

  22. Bonjour à tous,
    je pense que le problème ne réside pas seulement dans l’acquisition de l’OLPC Bastien.
    Qu’à cela ne tienne l’OLPC coute aujourd’hui plus cher qu’un livre de classe. 30 000 francs CFA suffisent à acquérir tous les livres de classes pour un élève.

    Mais le hic réside dans la mise en oeuvre et dans la pérennité de ce programme.
    – Dans la mise en oeuvre j’ai évoqué la question de contenus. A cela s’ajoute la question de la formation des enseignants aussi bien à l’usage des outils notamment des logiciels d’application qu’en pédagogie. Parce l’utilisation de ces outils modifient fondamentalement les approches pédagogiques. Mais actuellement nos pays n’ont pas suffisamment d’enseignant et aussi la question de la formation est problème réel. Chaque année au Burkina Faso plus de deux cents enseignants sont recrutés et envoyés directement sur le terrain sans formation de base. Avec quel moyen formé l’ensemble des enseignants pour une intégration de cet outil dans les activités pédagogiques.

    -Au niveau de la pérennité, quelle est la durée de vie d’un OLPC? la question d’acquisition des outils. L’OLPC est entrain de passé de linux à windows. Savez-vous que l’étape actuelle plus de 80% des logiciels qui sont utilisés dans mon et même dans l’administration comprise ne sont sans licence.

    -Je pense qu’il faut être prudent et ne pas s’engager dans une voie à issue incertaine. Je reconnais que le monde est aujourd’hui porté par les TIC et qu’il le sera encore davantage dans le futur. Aucun pays qui souhaite jouer sa partition dans ce monde ne peut faire fi de cette nouvelle donne. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut prendre tout ce qui tombe sous la main. Ce n’est pas parce qu’on est affamé qu’on doit manger tout ce qu’on reçoit sans prendre le soin de vérifier si c’est danger pour son organisme puis qu’on recherche la survie en s’alimentant.

    -Celui qui veut aider nos pays doit nous approcher et aller surtout à la base pour connaitre les besoins réels des bénéficiaires directs pour une réussite de son entreprise. Je suis l’un des pionniers dans le domaine de l’usage de s TIC dans l’éducation dans mon pays et je pense et je sais que ce n’est pas aussi facile qu’écrire parce que je vis les difficultés au quotidien.

    Merci et à bientôt

  23. Bonjour,

    tout d’abord un grand merci de vous exprimer et de donner ainsi une chance au dialogue. Je voudrais rapidement revenir sur la plupart des points que vous soulevez.

    Tout d’abord, et parce que cela me semble être le plus important, la question des besoins réels : je suis parfaitement d’accord avec vous. Le récent sommet de la FAO à Rome est très instructif à cet égard : il est toujours difficile d’évaluer les « besoins réels », de ne pas sauter sur des solutions toutes faites.

    Mais je peux vous assurer que le projet OLPC s’inscrit parfaitement dans cette démarche d’évaluation des besoins réels par les personnes qui sont en charge de l’éducation dans les pays. OLPC ne cherche pas à inventer des besoins en nouvelles technologies là où il y en a pas, mais à aider les pays qui ont déjà une volonté politique dans ce domaine. Bien sûr, cette volonté politique interne peut elle-même ne pas être en phase avec les besoins réels, mais c’est – je crois – une autre question. Dans tous les cas, il ne s’agit jamais d’une modification du système éducatif imposée et contrôlée de l’extérieur : il s’agit au contraire de fédérer les quelques personnes qui, dans les pays, croient que les TICE peuvent améliorer le dispositif éducatif.

    Un autre point à souligner, c’est qu’OLPC n’est plus tout seul. D’autres initiatives proposant des ordinateurs « éducatifs » aux pays en voie de développement ont vu le jour. Ces autres initiatives sont ouvertement rattachées à des entreprises dont le but premier n’est pas l’éducation, mais la conquête d’un marché. Je pense qu’OLPC cherchera toujours à se distinguer de ces autres initiatives en insistant sur l’éducation et sur l’indépendance des pays dans ce domaine.

    Au sujet de Windows, une légère mise au point: non, OLPC (et les ordinateurs XOs) ne sont pas du tout en train de migrer sous Windows… l’agitation autour de l’accord OLPC-Microsoft a entretenu trop de malentendus. Cet accord ne concerne que le fait d’autoriser Microsoft à installer Windows sur le XO, et seulement pour les pays qui en font la demande… pour l’instant, je n’ai aucun chiffre sur cette demande, et tous les ordinateurs XOs actuellement déployés le sont sous un système 100% libre, GNU/Linux.

    Même quand quelques XOs seront déployés sous Windows, la seule innovation pédagogique viendra de l’environnement Sugar… pas de Windows, et cet environnement Sugar restera toujours libre.

    Certains voient dans cette bataille un enjeu pour le libre. J’y vois certes cela, mais j’y vois surtout un enjeu pour les pays : utiliser du libre, cela signifie justement qu’on est attentif aux besoins pédagogiques réels (une fois qu’on a fait le pari qu’il est intéressant d’utiliser un ordinateur à l’école), qu’on se donne la liberté de créer des contenus construits collaborativement, qu’on possède la maîtrise des logiciels et des activités dont le XO est le support, qu’on est libre de mettre en place des formations pour assurer la pérennité du projet.

    Où je retrouve vos premiers points, les contenus, les formations et la pérennité. Les contenus pédagogiques sont élaborés par les pays, ne serait-ce qu’à cause des problèmes de langue. Bien sûr, il y a des collaborations un peu partout et, par exemple, des pays francophones peuvent travailler entre eux pour élaborer des contenus. Mais au final, les pays seront toujours libres d’adapter ces contenus à leurs besoins, à ce que les enseignants peuvent et veulent en faire. Là encore, les principes d’ouverture et de liberté sont essentiels pour garantir la possibilité d’adapter les contenus. Même chose pour les formations : il y a évidemment des passerelles entre les gens d’OLPC et les systèmes éducatifs, mais ces passerelles sont faites pour travailler avec les éducateurs, pas pour imposer des réponses…

    Je ne vais pas m’étendre plus longuement. Je loue toute attitude de prudence lorsqu’il s’agit des TIC à l’école – il y a eu trop de promesses non tenue, trop d’échecs, trop d’efforts vains. Mais je crois qu’OLPC se distingue par un mélange d’ambition et de modestie qui le rend apte à mobiliser les bonnes volontés utilement.

    A nouveau merci de cette discussion, et n’hésitez pas à me contacter en privé pour la prolonger (bastien.guerry@free.fr).