Rendre les ondes radio tangibles

A l’heure ou l’Agence de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail publie une étude qui confirme que les radiofréquences ont des « effets indéniables sur le fonctionnement des cellules », force est de reconnaître qu’on risque d’avoir longtemps encore du mal à visualiser l’impact des ondes du fait de leur invisibilité même. Faudrait-il parvenir à les rendre visibles pour être plus conscients de leurs portées ou de leurs dangers ?

Les designers Timo Arnall et Jack Schulze ont publié un prototype (vidéo) permettant de visualiser le volume de lisibilité d’un objet RFID.

Immaterials : the ghost in the field from timo on Vimeo.

Leur recherche s’est inspirée d’un étonnant court métrage documentaire sur les ondes magnétiques (vidéo) réalisé par Ruth Jarman et Joe Gerhardt. Un documentaire qui explorait également les manifestations audibles et visibles des ondes, au volume de perception chaotique et à la géométrie toujours changeante.

Magnetic Movie from Semiconductor on Vimeo.

« La RFID est encore mal comprise comme technologie interactive », expliquent les deux designers. Selon eux, la raison en est que l’interaction est fondamentalement invisible : en tant qu’utilisateurs, nous devons faire l’expérience de deux objets communicants à travers la « magie » des ondes radio, c’est-à-dire leur invisibilité. Si l’invisibilité apporte quelques avantages (l’absence de toucher notamment), elle est aussi un défi pour les concepteurs. Arnall et Schulze ont travaillé sur la façon dont la technologie RFID habite l’espace, afin de nous permettre de mieux comprendre les types d’interactions que l’on peut construire avec elle. Afin d’étudier le volume lisible autour d’un lecteur de puce, les designers ont construit des sondes expérimentales dotées de LED qui affichent l’espace dans lequel une étiquette RFID va interagir avec un lecteur, afin de montrer les propriétés spatiales de cette interaction.

Une carte de transport Oyster et son environnement magnétique
Image : Une carte de transport Oyster et son environnement magnétique par Timo Arnall.

En intégrant plusieurs modèles de lecteurs d’étiquettes RFID, leur étude montre la spatialité et la complexité physique de la relation entre un lecteur et son utilisateur. Une relation qui n’offre pas le même volume d’interaction selon qu’on utilise un lecteur RFID standard ou une carte de transport dotée d’une puce par exemple. L’interaction est également influencée par l’orientation du lecteur qui modifie le périmètre d’interaction. Tout le but de ce projet est de permettre à terme une meilleure construction de modèles spatiaux et gestuels, en comprenant mieux la portée des ondes.

Avant de publier leur prototype, Timo Arnall a dressé une très intéressante liste des réflexions et des expérimentations du même type, comme les projets en liens avec les ondes hertziennes imaginés par les plasticiens Fiona Raby et Anthony Dunne, auteurs de Design Noir : The Secret Life of Electronic Objects. Plusieurs de leurs « objets radiogéniques » consistaient d’ailleurs à rendre visibles les signaux radios d’équipements domestiques, comme ceux d’écoutes bébés, afin de mettre à jour l’environnement électromagnétique.

Outre les bulles radios, cette encyclopédie fictionnelle des ondes radios ou sa réflexion sur comment rendre l’interaction invisible compréhensible, Timo Arnall rappelle que de nombreuses expériences ont consisté à traduire les ondes en espaces sonores ou visuels, comme ce fut le cas par exemple des projets de réseau libre et visible (et de son télescope) ou de l’Electroprobe de Josh Rubin qui permet d’écouter les ondes émises par les objets.

Une liste qui sera une bonne base pour comprendre la spatialité des systèmes de capteurs appelés de plus en plus à nous entourer.

À lire aussi sur internetactu.net

0 commentaires

  1. Je m’éloigne un peu du sujet de l’article…
    C’est assez curieux de voir comment le terme « tangible » (que ce soit en anglais ou en français) est détourné de son sens initial, en rapport avec le toucher uniquement. Les ondes sont rendues tangibles parce qu’elles sont visibles par la led.
    Il y aurait finalement une espèce de glissement sensoriel peut-être?

  2. Je suis tout a fait d´accord avec Clément mais je vais plus loin. Ayant tangible aussi en spagnol, ma langue, le mème sens, je trouve que son usage dans ce cas est erroné. Il faudrait dire, dans mon avis, sensible