NationBuilder : aide-toi, le logiciel t’élira – Libération

Sur Libé, Amaelle Guitton revient en détail sur NationBuilder, cette plateforme de campagne électorale (mais pas seulement, une version entreprise de ce “logiciel pour les leaders” existe également, le faisant plus ressembler à un CRM qu’autre chose) qui fournit aux candidats aux élections un kit d’outils pour gérer site web, newsletters, donation en ligne et surtout base de contact. Dans son article, Amaelle Guitton revient sur son fonctionnement en France en détaillant qui l’utilise (ou qui utilise ses concurrents, comme Blue State Digital, NGP Van, ou les français Cinquante+1 et DigitaleBox). Si pour la chercheuse Anaïs Théviot ces outils proposent une vision très marketing du militantisme, les utilisateurs de ces outils semblent plus pragmatiques ou rassurant : en France, nous serions encore loin du profilage, plutôt dans des formes d’animation militante

Ce qui est sûr, c’est que contrairement à ce qu’avançait Numerama comparant la capacité à créer des communautés via NationBuilder avec les méthodes de Podemos, il semble y avoir une grande distance entre ces outils et ceux qui se construisent autour de Nuit Debout par exemple. Notamment et d’abord dans l’approche et la vision que les outils ont des citoyens. Comme le dit très clairement le chercheur Olivier Ertzcheid : quand on “construit une nation comme un fichier client, on obtient au final une nation de clients et une démocratie clientéliste.”

MAJ : Numerama livre une enquête sur le fonctionnement des outils numériques de NuitDebout. A compléter par celle d’Amaelle Guiton sur Libération

Olivier Cimelière, sur le blog du communicant, s’énerve du “syndrome de la boîte à outil”, consistant à utiliser un outil à chaque enjeu de communication nouveau qui se présente ou que l’outil est la solution miracle qui fera forcément la différence :

“le paradoxe de cette efficacité décuplée est qu’il vient encore un peu plus nourrir cette vision purement technologiste de la communication. En d’autres termes, il suffit d’installer l’outil, configurer quelques paramètres, appuyer sur un bouton et recevoir peu de temps après la récolte sous forme de camemberts multicolores, d’histogrammes bigarrés et autres livrables soigneusement packagés pour rendre l’info plus digeste et forcément parfaite.

C’est d’ailleurs le même registre de croyance qui prévaut actuellement avec l’engouement autour des chatbots qui vont répondre sur les messageries instantanées en ligne et qui vont ainsi forcément améliorer la relation avec les clients, les fournisseurs, les électeurs, etc. Alors qu’on aurait pu croire que la complexification croissante des stratégies de communication avec l’avènement du Web social aurait incité les professionnels du secteur à d’abord privilégier la compréhension de leurs propres enjeux et publics avant de choisir tel ou tel outil, c’est en fin de compte l’inverse qui se produit avec le retour en force et en fanfare de la « boîte à outils » miracle qui va tout révolutionner et solutionner sans trop d’huile de coude, ni jus de cerveau. Cette culture très utilitariste recèle pourtant des pièges létaux. Que des outils soient la traduction concrète d’une stratégie mûrement réfléchie ne pose en soi aucun problème. Néanmoins, lorsque ces derniers deviennent la stratégie elle-même, on s’égare dans une confusion très regrettable. Un outil à lui seul n’a jamais assuré le succès intégral d’une communication d’entreprise, de marque ou de personnalités. Il n’est qu’un vecteur plus ou moins pertinent qu’on active en fonction d’un contexte donné, d’une problématique à résoudre et d’acteurs qui gravitent autour de celle-ci. (…) Même l’intelligence artificielle dont certains vantent l’hyper-puissance inégalable est encore capable de se faire berner par des petits malins. L’avatar Tay de Microsoft s’en souvient encore sur Twitter !”

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