La trivialisation de l’internet – Christophe Benavent

Pour le spécialiste du maketing, Christophe Benavent, nous sommes entrés dans l’ère de la trivialisation de l’internet, qui explique en partie le désenchantement actuel…

“L’hypothèse de la trivialisation est qu’à mesure que de plus en plus d’ individus y sont connectés, et qu’à mesure qu’ils y soient connectés par plus d’écrans,  les activités qu’ils y poursuivent y deviennent de plus plus ordinaires. La résolution des problèmes de la vie courante (de la consultation météo à la vérification d’un horaire de train), et le divertissement prédominerait sur les activités contributives (production et partage de réflexions personnelles, de musiques, d’images élaborées) et l’effort de développement personnel (éducation et formation).”

Et effectivement, on s’aperçoit dans les études que la masse des utilisateurs du net s’en tiennent à des activités minimales… Internet est-il appelé à devenir le “robot-ménager” du XXIe siècle, ne servant qu’à améliorer la productivité de la consommation ? Si pour un petit groupe d’usagers qui en font un usage important, les activités sont diversifiées, la plupart ont des usages fonctionnels et basiques ou de simple divertissement. Pour Christophe Benavent, les études mettent en évidence le fait que “dans la population seule une minorité (sans doute moins de 10 %) a une activité de production et d’investissement. La grande majorité se contente de consommer et ne fait qu’assez peu peu d’effort. Il reste à montrer que cette tendance se développe dans le temps et que l’élargissement de la population connectée d’une part et que l’intensification de l’usage (temps passé sur les smartphone) la renforce.”

“Si cette hypothèse est juste, les conséquences pour le marketing sont importantes. La principale est celle du désenchantement. Au moment où les entreprises, notamment de distribution pensent trouver une solution dans le digital pour renouveler la relation, elle risque de n’y créer que des déceptions : les applications et les services offerts ne prennent de sens que dans la mesure où elles aident concrètement à résoudre les problèmes de la vie quotidienne (et notamment ceux crée par la digitalisation de la relation) en demandant un minimum d’effort. La seconde que l’on observe déjà dans la création publicitaire, en est le corollaire : (…) c’est une logique de divertissement où la finalité est la maximisation de gratifications immédiates.

L’internet n’est plus une fenêtre ouverte sur le monde, ni un instrument de transformation de soi. La magie de la découverte fait place au prosaïsme du moindre effort et de la satisfaction immédiate.  Ce n’est pas seulement le fait des stratégies des grandes entreprises de l’internet, mais de celles de ses utilisateurs. L’horizon de l’usage de masse se rétrécit à la vie de l’instant et l’espace ordinaire des commodités.”

On laissera au moraliste le soin de juger cette évolution, on se contentera d’en tirer une recommandation importante pour tous ceux qui réfléchissent aux stratégies multi cross ou omnicanal, qu’ils ne peuvent tirer avantage de la digitalisation simplement en équipant les points de vente avec de la quincaillerie électroniques, et à ceux qui veulent améliorer les service qu’il suffira de multiplier les applis. Les avantages de la surprise seront de courte durée. L’enjeu est la perfection de ces dispositifs : une simplicité absolue, une efficacité redoutable au service des tâches les plus humbles que les consommateurs sont amenés à réaliser. Sur un autre plan, il conviendra à veiller que la marque reste vivante, que ses significations restent riches et que l’intrication des câbles et des applications n’étouffent pas la faculté des dispositifs matériels de la relation à véhiculer le sens et l’identification.

La trivialisation de l’internet oblige désormais à un effort de créativité supplémentaire pour que le désenchantement n’affecte pas aussi les marques. Les bonnes stratégies marketing sont celles qui iront au-delà du digital.“

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