Et si chacun pouvait construire son propre internet haut débit ?

La neutralité du Net consiste à s’assurer qu’aucun fournisseur d’accès ne puisse accorder de traitements préférentiels aux contenus. C’est-à-dire que les opérateurs de télécommunication ne discriminent pas les communications de leurs utilisateurs et permettent à tout le monde d’accéder au même réseau. Régulièrement mise à mal par des acteurs cherchant à brider, bloquer ou favoriser des accès ou des contenus, cette caractéristique de l’architecture décentralisée d’internet est toujours défendue comme étant la clef de la liberté de communication et d’innovation qui a fait son succès. Dans ce débat récurrent entre fournisseurs de contenus et opérateurs, les utilisateurs semblent souvent instrumentalisés par les uns et les autres. Mais que se passerait-il s’ils reprenaient la main ?

Lors d’une récente conférence, les chercheurs de Stanford Yiannis Yiakoumis, Sachin Katti et Nick McKeown ont présenté un concept (.pdf) baptisé « cookies de réseau », qui permet aux utilisateurs de décider les contenus qui auront la priorité sur leur connexion.

« Vous voulez une connexion rapide pour vos films Netflix ? Vous pourriez le faire. Vous voulez une connexion rapide pour Skype ? Pas de problème, mais ces choix peuvent ralentir d’autres choses ». Les cookies de réseaux, baptisés ainsi en référence aux cookies informatiques qui mémorisent vos préférences ou votre historique quand vous passez d’une page à une autre sur le web, permettent à l’utilisateur de décider à quel trafic donner une priorité, permettant au FAI de le gérer en fonction de vos indications. Les chercheurs ont déployé un prototype fonctionnel, baptisé Boost, qu’ils ont testé auprès de 160 foyers. Les utilisateurs avaient accès à une extension pour Chrome, basée sur AnyLink, leur permettant de décider quels services ou contenus ils souhaitaient favoriser, privilégier, c’est-à-dire « booster ».

Les cookies de réseau sont-ils le moyen par lequel les FAI mettront à bas la neutralité du net en s’alliant aux utilisateurs ?, s’interroge Klint Finley pour Wired ? Pour les chercheurs en tout cas, si les fournisseurs de contenus et d’accès pour l’instant prennent des décisions au détriment des utilisateurs, laisser les utilisateurs déterminer leur trafic pourrait rétablir l’équilibre. Cela permettrait aux utilisateurs d’avoir accès au réseau qu’ils souhaitent, aux FAI d’apporter plus de valeurs à leurs utilisateurs et aux contenus populaires d’obtenir un traitement préférentiel, même si leur service est mal dimensionné. Pas sûr pourtant que cette description très libérale de la neutralité des réseaux soit exacte. Donner la préférence à ce que les utilisateurs veulent ou voient oublie de poser la question de ce qui ne leur est pas proposé, de ce qu’ils ne veulent pas ou voient pas.

Reste que le concept proposé s’apparente bien à un nouveau levier qui pourrait, s’il était déployé, transformer radicalement notre accès au réseau des réseaux.

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