Philippe Gay, France Télécom R&D : « Les courants porteurs sont encore du domaine Recherche et Développement »

France Télécom travaille également sur les courants porteurs en ligne et va lancer prochainement une expérimentation dans le cadre de « réseaux domestiques » à Lannion. Avec dans un premier temps une seule priorité : voir si ça marche !
Interview de Philippe Gay, expert PLT chez France Télécom R&D à Lannion

France Télécom travaille également sur les courants porteurs en ligne et va lancer prochainement une expérimentation dans le cadre de « réseaux domestiques » à Lannion. Avec dans un premier temps une seule priorité : voir si ça marche !
Interview de Philippe Gay, expert PLT chez France Télécom R&D à Lannion

En avril 2001, France Telecom annonçait une expérimentation qui consiste à prolonger un raccordement ADSL dans la maison au moyen du réseau électrique et d’en observer les usages. Où en est cette expérimentation ?

Elle devrait débuter dans les prochains jours. Au printemps dernier nous avons étudié les différents matériels existants sur le marché et observé en laboratoire les résultats que nous pouvions obtenir. Aujourd’hui nous avons sélectionné le matériel et nous allons pouvoir tester les courants porteurs en « indoor » (intérieur) auprès de quelques personnes vivant dans les environs de Lannion, équipées d’une connexion ADSL et de plusieurs ordinateurs.
Il s’agit d’une expérimentation qui s’inscrit dans le cadre de la recherche et développement. Grosso modo les enseignements que nous avons tirés de nos tests en laboratoires démontraient que, via les courants porteurs, nous pouvions obtenir des débits importants sur les lignes électriques, suffisants pour passer de la vidéo, mais pour cette expérimentation sur le terrain, nous avons choisi un matériel moins performant que ceux que nous avons testés en labo : le débit sera de l’ordre de 0,5 megabits par seconde en IP.
Dans un premier temps nous allons observer ce que font les gens de cette technologie donc nous mettons l’accent sur la facilité d’emploi.

Quels sont les objectifs de cette expérimentation ?

L’objectif est de voir comment les gens vont réagir face à ce nouveau concept. Typiquement, les gens ont parfois, chez eux, un deuxième PC un peu ancien qui pourrait finalement très bien servir en étant relié au PC neuf, pour la messagerie, les pages internet, les jeux, un accès au disque dur du PC portable…
Nous allons observer si le fait de passer par la prise électrique pour raccorder deux PC apporte vraiment un confort de raccordement. Pour le moment, cette expérimentation s’inscrit dans le simple cadre d’un service à l’habitat. Mais pourquoi pas, un jour, faire passer la radio par ces fils électriques, monter en débit et offrir des services différents, ou encore essayer de raccorder des appareils différents : set top box , chaîne hi fi, téléviseur… Mais il faut être prudent : faire passer des images et des vidéos par les fils électriques, pourquoi pas  : les démonstrations en laboratoires montrent que c’est techniquement possible. Mais dans le cadre d’un domicile réel, je ne prendrai pas le risque de dire que c’est réalisable avant plus ample informé.

Quels sont les freins aujourd’hui ?

Il faut savoir que le fait de passer des données sur fils électrique, provoque un rayonnement et nous voudrions être sûrs que les rayonnements ne risquent pas de perturber les fréquences d’urgence des pompiers, la CB ou les ondes courtes. Les premiers tests sont encourageants mais on n’est jamais sûr de rien dans le domaine des ondes radio : suivant la fréquence utilisée, suivant les niveaux, suivant le réseau électrique de la maison on peut avoir des comportements très différents. Et d’un pays à un autre les plans radio sont différents.
Nous sommes très attentifs à ce qu’il se passe en Allemagne, entre autre pour cette raison et nous ne sommes pas convaincus.

Pour quelles raisons ?

En Allemagne l’ouverture commerciale de CPL s’est faite à la fois sur le réseau d’accès et sur le réseau résidentiel. Toutefois, le régulateur allemand n’a pas encore fini ses travaux ni conclu sur la validité du concept. Or dans ce cas précis, ce n’est pas un domicile qui est en jeu, mais également les lignes électriques publiques entre le transfo et différents domiciles. Pour être mis sur le marché en Europe ces matériels doivent respecter une norme appelée 55 022 ou constituer un dossier démontrant que le matériel ne rayonne pas. Or cela dépend tellement de chaque cas qu’il est très difficile d’être affirmatif dans ce domaine.

Des freins qui sont donc essentiellement réglementaires ?

Oui. Aux Etats Unis, le frein réglementaire existe également, mais de façon beaucoup moins rigide et le matériel peut être mis sur le marché beaucoup plus facilement. Mais malgré ces freins, France Télécom fait tout de même partie du Home Plug Power Line Alliance : si jamais la réglementation évolue, au moins nous serons en contact avec les industriels qui travaillent sur le sujet. Aux US, Phonex, Quelmann et Linksys devraient sortir du matériel prochainement.

Comment voyez vous l’avenir de cette technologie ?

Pour l’instant tout ce que je peux dire c’est que cette technologie reste encore du domaine de la recherche et développement. Nous ne nous engageons pas, mais, si cela débouche, la PLT (Powerline Telecommunication – autre nom des courants proteurs en ligne) serait un outil de plus pour de futurs services, de nouveaux usages dans le cadre des réseaux résidentiels.

On pourrait l’étendre au monde de l’entreprise ?

Honnêtement, passer les données sur fil électrique dans le domaine de l’entreprise, je n’y crois pas trop. Cette technologie permet surtout de raccorder deux ordinateurs sans avoir besoin de câbler, de percer un mur. C’est avant tout du confort. Dans le cadre d’une entreprise, je pense que les gens n’hésiteraient pas à tirer un cordon ethernet même s’il faut percer quatre murs. Passer sur fil électrique, c’est bien dans le domicile, dans les écoles si l’installation électrique s’y prête. Mais il y a d’autres solutions techniques : la radio, ou un câblage supplémentaire. Aux Etats-Unis le CPL vise plutôt le domaine résidentiel.

Quel est le « plus » de cette technologie par rapport aux technologies sans fils comme Bluetooth, Wi fi ? Est-elle plus fiable ?

L’avantage de la PLT par rapport à Bluetooth est que le débit est un peu plus important, puisque Bluetooth ne dépasse pas le mégabit par seconde. Or, sur ligne électrique, nous avons de grands espoirs de dépasser les 10 megabits par seconde, mais cela reste à vérifier. Par rapport à 802.11b (Wi Fi) , pour France Télécom, les deux se valent et nous proposerons les deux. La téchonologie des courants porteurs en « indoor » est pour nous un outils… parmi d’autres.

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