Message aux jeunes : adoptez la « Net attitude »

Pas moins de trois ministres – Renaud Donnedieu de Vabres, Patrick Devedjian et François d’Aubert – étaient réunis hier au Ministère de la culture, pour annoncer la sortie du guide « Adopte la Net attitude ! ». Destiné aux adolescents et réalisé par le Forum des droits sur l’internet, en partenariat avec le Ministère de la culture, le Ministère de la recherche (via la Délégation aux usages de l’internet), une dizaine d’organismes représentants les ayants-droits (notamment Sacem, Sacd, Adami, Snep) et Vivendi Universal, le guide est destiné à fournir des repères juridiques et techniques en matière de P2P et de téléchargement sur le net.

Le guide sera diffusé gratuitement au format papier, à hauteur de 450 000 exemplaires, notamment dans les collèges, et au format électronique sur le web (PDF).

Sur la forme, l’opuscule de 16 pages est plutôt réussi : couleurs vives, mise en page très « actuelle », tutoiement, slogans accrocheurs (« Internet, c’est trop bien ! », « Tu crées, t’as des droits », « 3 conseils pour rester cool »…) contribuent probablement à le rendre accessible à tous.

Sur le fond, le guide rappelle avec clarté l’état de la législation : « Si tu télécharges des oeuvres contrefaites avec un logiciel de type eDonkey, eMule ou BitTorrent qui t’obligent à partager ce que tu es en train de télécharger, tu deviens contrefacteur. Même si tu ne fais réellement que télécharger de la musique et des films sans autorisation, tu risques d’être poursuivi devant les tribunaux » et incite à utiliser les sites de distribution légale. Et, tout en simplifiant l’impact du P2P sur le marché culturel, « si, lorsque tu télécharges une musique ou un film sur les réseaux P2P, ceci te conduit à ne plus acheter de CD ou de vidéos, ou à ne plus aller au cinéma, une partie du monde artistique ne gagne pas d’argent », le guide n’en reconnaît pas moins que « le P2P a du bon » et « peut être utilisé à des fins parfaitement licites ».

Mais cet ouvrage est surtout le résultat d’une prouesse : faire s’accorder sur un texte de multiples intervenants qui ont souvent exprimé par leur passé leur désaccord, que ce soit sur l’interprétation de la notion de copie privée ou les actions répressives à mener. Ainsi, lors de la conférence de presse, le Ministre délégué à l’industrie, Patrick Devedjian, soulignait-il « que toute campagne de répression aveugle et brutale serait nuisible », tandis que le représentant de l’Unaf (Union nationale des associations familiales, ayant également participé à la rédaction du guide) demandait avec force « l’arrêt des poursuites judiciaires menées à l’encontre des utilisateurs du P2P qui n’en font pas un usage commercial ».

Patrick Devedjian insistait aussi sur le fait que « le P2P est utile pour le développement d’Internet ». De son côté,  Isabelle Falque-Pierrotin, présidente du Forum des droits sur l’internet, reconnaissait volontiers que « tous les membres du comité éditorial n’étaient pas d’accord sur tout » et expliquait que le guide ne constituait pas « une prise de position », ni n’exposait une vision « militante ». De fait, si tous les représentants ayant oeuvré pour mettre au point ce guide se félicitaient du « consensus » auquel ils sont parvenus, ce qui revenait souvent était plutôt la notion de « consensus minimal ». L’expression semble, en effet, mieux à même de qualifier ce texte, dont l’ambition avouée était davantage d’exposer la loi en son état actuel que de résoudre les problèmes de fond que pose le P2P.

Le principal reproche que l’on peut d’ailleurs faire à la démarche ne porte pas véritablement sur le contenu du guide, mais sur l’état de l’offre. En ne cherchant pas à dissocier les problématiques de la musique et des films sur l’internet, qui semblent pourtant résulter d’usages et de motivations distincts, les auteurs ont pris un risque. Il est ainsi recommandé aux adolescents de « télécharger sur des sites de vente en ligne », en soulignant par ailleurs que ces sites « décollent« . C’est vrai de la musique, mais on ne peut pas en dire autant des sites de vente de films en ligne qui, à ma connaissance, n’existent pas encore en France. Recommander des alternatives légales au P2P est sans doute une bonne chose, mais il conviendrait peut-être auparavant que les acteurs fassent en sorte que ces alternatives existent.

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  1. Il serait également intéressant d’inciter les jeunes à utiliser toutes les créations libres de droits ou sous licence CC, qui se multiplient, notamment pour la musique.