S’exprime-t-on pour influencer, ou pour informer ?

Evelyne Broudoux, maître de conférences en Sciences de l’information et de la communication à l’IUT de Vélizy, interroge depuis des années les notions d’auteur et d’autorité appliquées à l’internet (cf la liste de ses contributions sur archiveSIC, le site de l’Archive Ouverte en Sciences de l’Information et de la Communication).

Récemment, elle se penchait sur la compatibilité de la pratique du blogging avec la publication scientifique. Le 31 janvier prochain, elle questionnera la question de l’auteur à l’occasion d’une journée d’étude des Unités Régionales de Formation à l’Information Scientifique et Technique (URFIST) consacrée à l’évaluation et à la validation de l’information sur Internet.

Dans une contribution intitulée « Construction de l’autorité informationnelle sur le web« , elle tente aujourd’hui de faire le tour des approches scientifiques de ces « systèmes bâtisseurs de réputation et de notoriété » et autres « outils sociotechniques d’autorité coginitive » qui font émerger informations, auteurs, documents et groupes sur l’internet, construisent des réseaux d’influence et remettent en question « les « autorités » sur lesquelles étaient basées l’attribution de confiance, la vérification et la légitimation de l’information« .

De la Rome antique aux siècles des Lumières, étaient considérés comme auteurs les Dieux puis celui qui avait commandé l’ouvrage, celui qui l’avait inspiré, et non celui qui l’avait réalisé (le constructeur, l’écrivain). Jusqu’à la fin du XVIIIe, le « bon » écrivain était celui qui reprenait les textes des anciens en « variant » avec bonheur.

Puis il y a à peine trois cents années, l’auteur « original » émerge et est considéré comme « bon » auteur celui qui produit quelque chose venant de lui-même. L’autorité traditionnelle s’éloigne au profit des autorités institutionnelles (apparition de l’éditeur, droits de l’éditeur
et de l’auteur), en même temps qu’apparaissent de nouvelles techniques de reproduction à l’identique (imprimerie à caractères mobiles).

Vraisemblablement, nous avons entamé un nouveau virage avec le XXe siècle, au vu :
– des figures émergentes d’auteurs : décentralisé (Wikipédia), collectif (ou) machinique (communiqués météo, pages html dynamiques),
– des nouveaux modes de filtrage des textes (filtrage a posteriori dans la publication distribuée),
– de l’installation de nouveaux « intermédiaires » de l’information comme les blogueurs dans le champ de l’information professionnelle,
– de l’apparition de groupes sociotechniques informels -partage de ressources (Del.icio.us, Digg, etc.), partage et création de contenus (Flickr, YouTube, Ekopedia, etc.), constitution de communautés (MySpace, TagWorld, LinkedIn, etc.), auditeurs (Last.fm), lecteurs (BookMooch), etc.-
– de la décentralisation et la distribution des activités éditoriales.

Au final, « l’apparition de groupes informels issus de réseaux sociotechniques exerçant de nouvelles formes de filtrages, l’affaiblissement de la reproduction d’exemplaires en série au profit de prototypes, les transferts d’activités entre auteurs, éditeurs, publishers-diffuseurs, tout ceci augure d’évolutions devant modifier à terme le paysage des « industries culturelles » et celui du champ documentaire« .

D’autant que cette nouvelle « autorité informationnelle (…) n’a pas pour fonction principale l’influence mais celle d’in-former (donner une forme), synonyme de « renseigner sur », c’est-à-dire porter un événement à la connaissance d’une sphère sociale ou d’un individu . »

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  1. Le blogging est une « autorité informationnelle » par excellence. mais internet en général a connu plusieurs révolutions. D’abord les moteurs de recherches, l’e-mailing, l’affiliation et puis maintenant le phénomène des blogs.