Quel a été l’impact de l’internet sur la vie de couple ?

Le Pew Research Internet Project, branche du think tank américain The Pew Research Institute (@pewresearch) a publié il y a quelques semaines une étude dont je vous propose quelques résultats (avant, je précise que cette étude porte sur une population états-unienne et que par couples on entend indistinctement couples mariés ou non, avec enfants ou non).

Sur l’impact général des technologies dans la vie de couple :

PI-couples-technology-02-11-2014-07Si 10 % des gens en couples disent qu’internet a un impact majeur sur leur vie de couple et 17 % disent qu’internet a un impact mineur, 72 % des gens en couples disent qu’Internet n’a “aucun impact réel” sur leur vie de couple.

Et sur la part qui considère qu’internet a un impact sur la vie de couple, les trois quarts jugent cet impact positif. C’est beaucoup, mais ça ne fait pas 20 % du total des personnes interrogées.

Est-ce que les technologies aident à la vie de couple ?

21 % des gens en couples considèrent que le fait de pouvoir communiquer sur internet ou par texto les rapprochent l’un de l’autre (ça signifie que 80 % considèrent que ça ne rapproche pas particulièrement). 9 % considèrent même qu’ils ont réussi à résoudre un problème de couple grâce à la communication par mail ou par texto.

Est-ce que les technologies nuisent à la vie de couple ?

25 % des gens disent avoir ressenti que la personne avec laquelle ils sont en couple passe trop de temps sur son téléphone quand ils sont ensemble. Dans 8 % des cas, ça a même été un sujet de dispute. Mais seuls 4 % des gens disent s’être mis en colère à cause de quelque chose que l’autre faisait sur son téléphone.

Bien sûr, le Pew Institute remarque que dans tous les cas, plus les couples sont jeunes, plus ils considèrent comme importante la part que prennent les technologies dans leur vie de couple (à la fois positivement et négativement).

Est-ce qu’un couple partage internet ?

PI-couples-technology-02-11-2014-01Le Pew Institue s’est intéressé à un aspect inédit de la relation numérique au sein des couples : le partage des mots de passe et des comptes. Si 67 % des gens en couples ont partagé le mot de passe d’au moins un outil numérique avec la personne qu’ils aiment, rares sont les personnes qui partagent des boites mail (27 %), des agendas en ligne (11 %) ou un profil sur un réseau social (11 %). On partage donc volontiers l’outil, moins volontiers le compte.

De tous ces chiffres, on peut conclure que cette étude n’est vraiment pas très intéressante. Ou si, elle est intéressante, mais parce qu’elle suggère à quel point des pans entiers de notre vie qui ne nous semblent être affectés qu’à la marge par les technologies. Pas sûr que ce soit de l’aveuglement. Je pense que le discours consistant à dire que tout change est le vrai discours aveugle. C’est surtout par la négative que ce rapport est intéressant.

Il y a quand même quelques chiffres frappants :

25 % des propriétaires de téléphone portable reconnaissent avoir envoyé un texto à leur partenaire alors qu’ils étaient tous les deux dans la maison. On aimerait savoir pourquoi. Par paresse ? Parce que parfois le texto est plus approprié que la parole (ainsi dans ces 25 % il faudrait mettre les 9 % qui résolvent leurs problèmes de couple par texto…) ?

PI-couples-technology-02-11-2014-11Autres chiffres frappants, ceux qui concernent le sexting, c’est-à-dire l’envoi de photos ou de vidéos suggestives, car, expliquent les auteurs de l’étude, l’usage des technologies dans la vie de couple ne se limite pas seulement à la coordination et à la logistique, mais peut comprendre des moments d’intimité coquine. Et ils remarquent que cette pratique du sexting est en hausse remarquable. C’est bien simple, en deux ans, un tiers de personnes en plus déclarent s’y livrer. Mais dans les détails, les chiffres sont étranges : 9 % des gens disent avoir envoyé un sexto d’eux-mêmes, mais 20 % disent avoir reçu un sexto de quelqu’un d’autre. Comment comprendre cet écart puisque d’après les chiffres, il y a deux fois plus de gens qui envoient des sextos qu’il y en a qui en reçoivent ? Je vois deux possibilités. Soit, il est considéré comme honteux d’envoyer un sexto de soi-même, mais glorieux d’en recevoir, et donc on est plus enclin à dire qu’on en reçoit. Soit il existe de serials envoyeurs de sextos qui en envoient beaucoup, et à beaucoup de gens.

Mais c’est au détour d’un petit chiffre que se cache à mon sens le principal enseignement de cette enquête : 3 % des gens avouent avoir transféré un sexto qu’on leur a envoyé à quelqu’un d’autre, ce qui n’est pas très sympathique. Mais surtout, alors que la pratique a cru significativement, ce chiffre de 3 % était le même lors de la dernière étude. Voilà, je crois qu’on a trouvé, enfin, la part irréductible et immuable de gens malveillants que compte l’humanité : 3 %. Ce n’est pas énorme 3 %. C’est rassurant.

Xavier de la Porte

Retrouvez chaque jour de la semaine la chronique de Xavier de la Porte (@xporte) dans les Matins de France Culture dans la rubrique Ce qui nous arrive sur la toile à 8h45.

L’émission du 12 avril 2014 de Place de la Toile (#pdlt) était consacrée à l’imagerie computationnelle en compagnie de Nicholas Ayache, nouveau titulaire de la Chaire informatique et sciences numériques du Collège de France où il a récemment prononcé sa leçon inaugurale.

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