Peut-on répondre aux (pires) trolls ?

Au cours de l’été 2015, Greg, Rasheed et quelques autres… ont commencé à lutter contre le racisme sur Twitter en répondant aux gens qui postaient des propos racistes que leurs tweets harcelaient et blessaient de vraies personnes. Mais ils n’étaient pas de vraies personnes eux-mêmes. C’était des bots, créés par Kevin Munger (@kmmunger), étudiant en politique à l’université de New York, rapporte Ed Yong pour The Atlantic. Son expérience a montré qu’un simple tweet pouvait aider à limiter le racisme en ligne. Mais, ce qu’elle a montré surtout, c’était que les réprimandes postées ne fonctionnaient que si les comptes qui postaient des réponses avaient comme image de profil un blanc avec beaucoup de followers. Rien de très surprenant, rappelle Betsy Levy Paluck, psychologue à Princeton : les personnes ayant un statut supérieur influencent les normes. En 2014 déjà, la jeune Trisha Prabhu avait créé une application anti-cyber-intimidation, Rethink, qui invitait les gens qui écrivaient des commentaires blessants à repenser à ce qu’ils voulaient poster. La plupart abandonnant alors, car quand on fait comprendre aux autres que ce qu’ils font à un impact, on crée une hésitation perturbatrice.

Munger a constaté que son approche était efficace surtout sur les utilisateurs anonymes de Twitter. Lorsque les harceleurs utilisent leurs vrais noms et leur image, ils sont bien moins affectés par les reproches du bot blanc influent. Un résultat qui va à l’encontre de l’intuition commune qui veut que les utilisateurs anonymes soient les plus terribles les uns envers les autres : en fait, c’est plus souvent l’inverse. Pour Munger, cela tient du fait que lorsque les gens choisissent l’anonymat, ils minimisent leurs identités individuelles au profit de leur identité de groupe. Cela les rend plus hostiles envers les personnes qui ne font pas partie de leur groupe et plus sensibles aux pressions sociales provenant de leurs groupes. Reste à trouver un moyen d’influence sur ceux clament leur haine sous leur propre nom. Car pour ceux-ci, une réprimande a plutôt tendance à les pousser à réaffirmer leurs préjugés. Peut-être qu’alors c’est le volume de retours qu’ils reçoivent qui pourrait avoir plus d’influence ? Des armées de trolls pour répondre aux armées de trolls, comme l’envisagent, dépitées, les associations qui réfléchissent à comment lutter contre la haine en ligne ? La solution est encore loin d’être magique, cela aurait été trop simple !

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