Robert Froehlich, EDF R&D : « Courants porteurs en ligne : ça fonctionne ! « 

Robert Froehlich, responsable des expérimentations CPL (Courants porteurs en ligne) chez EDF R&D suit de près les collèges de la Manche, mais aussi le collège Jean Zay de Valence où sont également testés les courants porteurs.
EDF R&D travaille depuis 1996 sur cette technologie mais principalement dans le cadre des réseaux domestiques. Avec une exception tout de même : une expérimentation de courants porteurs en ligne en « outdoor » a lieu en ce moment même à Strasbourg.
Interview.

Robert Froehlich, responsable des expérimentations CPL (Courants porteurs en ligne) chez EDF R&D suit de près les collèges de la Manche, mais aussi le collège Jean Zay de Valence où sont également testés les courants porteurs.
EDF R&D travaille depuis 1996 sur cette technologie mais principalement dans le cadre des réseaux domestiques. Avec une exception tout de même  : une expérimentation de courants porteurs en ligne en « outdoor » a lieu en ce moment même à Strasbourg.
Interview.

Qu’est ce qui vous a engagé à faire des expérimentations CPL dans les collèges ?

Nous avions testé les courants porteurs en ligne uniquement en laboratoire et nous avions besoin d’un lieu où nous pourions utiliser ces technologies sérieusement, un endroit où cette technologie répondait à un besoin. Au même moment, le conseil général de la Manche nous a fait part de son souhait d’expérimenter cette technologie.

Aujourd’hui, cela fait un an que les CPL fonctionnent dans cinq collèges de la Manche. Quelles sont les leçons que vous tirez de ces expériences  ?

D’abord que cela fonctionne ! Si nous avions des débits supérieurs ce serait encore mieux. Mais cette expérimentation s’est étendue à d’autres collèges et les gens s’en servent régulièrement. C’est une solution dont il faut maintenant comparer les coûts avec d’autres systèmes.

Aujourd’hui les débits sont de quel ordre ?

Pour l’expérience des collèges de la Manche il s’agit d’un débit d’environ 350 kilobits par seconde, partagé entre les utilisateurs. On devrait trouver facilement des produits à 2 megabits par seconde et c’est dans ce sens que nous faisons évoluer cette expérience. Ces débits peuvent encore monter dans l’avenir mais les produits ne sont pas encore prêts.

Vous observez les usages de ces technologies dans les collèges ?

Oui et nous avons observé qu’elle est bien adaptée aux usages dans le cadre d’une salle de classe où il n’y a pas de besoin permanent de connexion. Elle répond aux besoins ponctuels des enseignants. C’est le côté mobilité qui est intéressant.

A quels autres types de lieux cette technologie pourrait être étendue, en indoor ?

Les hôtels seraient un exemple typique, mais il n’y a pas d’expérimentation en cours aujourd’hui. Le calcul est simple : soit le besoin de communication est très fort et cela vaut la peine de payer un câblage, soit il est moyen mais on a besoin de pouvoir communiquer d’un peu partout et là les courants porteurs sont très adaptés.

Aujourd’hui on parle surtout de connecter des PC, mais que peut on imaginer avec d’autres terminaux ?

Dans la maison, une fois que les courants porteurs atteindront 3 à 5 mégabits par seconde, il sera possible de diffuser, sur le réseau électrique, l’équivalent d’un film. On peut très bien imaginer que les courants porteurs soient une solution qui permette de passer de son magnétoscope ou de son DVD à sa télévision. Ca simplifie beaucoup de choses. Mais c’est en compétition avec les technologies radio  : la radio est aussi simple, voire même plus simple et plus mobile, mais ne passe pas partout. En revanche, si l’on va plus loin dans la prospective, à condition que les coûts des points communicants diminuent sérieusement, n’importe quel appareil électrique est susceptible d’être connecté à Internet. On parle souvent du réfrigérateur qui va commander des produits. Imaginer comment il fonctionne, c’est l’affaire des fabricants. Mais comment communique-t-il, c’est une autre histoire et pour l’instant, tant qu’il n’y a pas de système de communication simple et facile, il n’est pas évident d’amener une prise téléphonique à son réfrigérateur ! Si le réseau électrique peut servir de relais c’est bien. Mais aujourd’hui les modems CPL sont à des prix tels que si cela vaut la peine de les mettre à côté d’un ordinateur, pour un réfrigérateur il va falloir attendre que ça baisse encore.

C’est une offre qui n’est pas encore commercialisable ?

Non. Les produits ne sont pas encore présents sur le marché. Les CPL sont encore une technologie en émergence, avec les aléas de toute nouveauté. Les niveaux de prix sont encore élevés. Les usages, autres qu’informatiques, on peut les imaginer, mais ils ne seront vraiment intéressants qui si le coût de la communication baisse.

Quels sont aujourd’hui les freins que vous identifiez au développement de cette technologie ? On a parlé du prix des produits, mais d’un point de vue technique ?

Ce qu’il faut c’est que les communications à haut débit puissent se faire avec le minimum d’effet de rayonnement qui risque de parasiter les réceptions radios. Il faut que l’on puisse tenir le débit avec des niveaux d’émission très faibles qui ne gênent pas pour écouter son émission radiophonique favorite. Cela limite donc la puissance de fonctionnement des courants porteurs et il faut que, dans cette limite, nous soyons très performants en traitement du signal pour transmettre le plus possible de débit. Les algorithmes de traitement du signal progressent. Cela veut dire, bientôt, des modems plus intelligents, plus performants donc un peu plus chers mais comme le prix des microprocesseurs baisse au fil du temps, le coût du traitement de signal baisse, donc on offre plus de débit pour le même prix, etc.

Vous faites également une expérimentation en « outdoor » (extérieur) à Strasbourg ?

Ce que nous expérimentons à Strasbourg ressemble à ce qui est commercialisé en Allemagne. Nous ne commercialisons pas, ce n’est pas notre objectif mais nous regardons quelles sont les performances possibles en utilisant le réseau électrique public. Aujourd’hui, nous constatons que les performances annoncées par les constructeurs se retrouvent sur le terrain. Je ne peux pas en dire plus car l’expérience n’est pas encore terminée. De plus nous sommes dans le cadre de la R&D : il s’agit surtout d’apporter un éclairage technologique et de performance sur cette technique CPL.

Comment voyez vous l’avenir du CPL ? Dans un cadre intérieur (maison, collège, hôtel) ou extérieur (outdoor) ?

J’ai n’ai pas d’idée à priori. Je ne vais pas me prononcer.

Le sujet des courants porteurs en « outdoor » semble toujours un sujet délicat ? C’est un problème lié à la place de chacun (compagnies d’électricités et opérateurs télécom)  ?

Chacun arrivera à trouver sa place dans l’avenir. Aujourd’hui nous travaillons sur la technologie, donc nous sommes plus tournés vers des relations avec les différents fabricants qui ont des systèmes courants porteurs, souvent à l’état de prototype. Actuellement nous nous attachons d’abord à tester ces nouveaux matériels. Après…
Mais les courants porteurs ce ne sont qu’un morceau de la communication : la partie fil électrique. Il faut bien qu’il y ait « quelque chose » derrière et au dessus. Derrière ce sont les appareils qui les utilisent et au-dessus se sont les réseaux télécom tels qu’ils existent sous toutes leur formes. Pour un immeuble, selon que l’usage est ponctuel ou intensif, les solutions techniques choisies ne seront pas les mêmes.

On ne peut pas imaginer ça dans une entreprise ?

Peut être en complément d’un réseau câblé, mais 100 % CPL j’imagine mal. Peut-être dans quelques années, mais à court terme c’est surtout du complément.
C’est une technologie en émergence, pas encore stabilisée dans ses vocations et ses niveaux de performances mais elle est prometteuse.

Quand cette technologie arrivera-t-elle sur le marché ?

Dès 2002 nous devrions trouver des produits commercialisés. C’est d’ailleurs déjà le cas aux USA, en Asie où les contraintes de normes réglementaires sont un peu moins sévères qu’en Europe.

À lire aussi sur internetactu.net