Au bout du réseau, quoi ?

Il est facile et tentant d’opposer les partisans d’un internet totalement décentralisé et ceux d’un réseau « géré ». La liberté contre le contrôle, le « bottom-up » contre le « top-down », les libertaires contre les réalistes, les informaticiens contre les utilisateurs…

Il est facile et tentant de radicaliser ces oppositions, d’en faire un débat philosophique ou politique. La réalité est plus prosaïque : au fond, il s’agit d’un choix économique.

Quatre constats nous semblent aujourd’hui incontestables :

1- Sous sa forme actuelle, l’internet a été et demeure un support d’innovation, voire de rêve, d’une efficacité sans précédent.

2- Le modèle décentralisé de l’internet s’est montré extraordinairement robuste. En 20 ans, l’internet est passé de quelques milliers à près d’un milliard d’utilisateurs ; son trafic a doublé chaque année ; il a supporté des applications de plus en plus diverses et exigeantes. Il ne s’est jamais effondré, aucune révision déchirante n’a été nécessaire.

3- Aujourd’hui, l’internet vit cependant une crise de croissance et a du mal à répondre aux quatre exigences qui émergent naturellement de son irruption au cœur de nos processus économiques et sociaux : la sécurité et la lutte contre les incivilités numériques (telles que le spam), la qualité de service, la rentabilité des acteurs qui en font leur métier, l’accessibilité à des utilisateurs que la technologie n’intéresse pas.

4- Le choix originel consistant à déporter l’intelligence aux extrémités du réseau, déporte également la complexité vers les utilisateurs. Il existe un énorme coût caché de l’internet, qui réside d’une part dans les équipements dont se dotent les utilisateurs, et d’autre part, dans le temps consacré à s’en approprier les concepts et les outils, à entretenir les outils, à traiter les problèmes rencontrés, etc.

On sait aujourd’hui que les questions techniques soulevées par la crise de croissance de l’internet peuvent trouver des réponses dans un modèle centralisé comme dans l’actuel modèle décentralisé. C’est donc dans l’analyse que l’on fera de ce coût caché que se trouve la clé de l’avenir.

Première question : pourrait-on, en re-centralisant certaines fonctions, faire baisser ce coût d’une manière significative, ou bien ne ferait-on que transférer les coûts d’un endroit à l’autre ? Rappelons qu’en téléphonie, l’on estime que les coûts liés à la gestion de systèmes complexes de comptabilisation, facturation, compensation, et aux services associés, représentent quelques 40% de la valeur ajoutée des opérateurs.

Seconde question : à supposer que le coût d’un système décentralisé soit, à usages identiques, globalement supérieur à celui d’un système plus centralisé, le surcoût est-il justifié par d’autres bénéfices économiques et sociaux ? Nous pensons que c’est le cas, dans trois domaines : l’innovation, la concurrence et l’appropriation par les utilisateurs.

Nous l’avons dit, l’internet est un formidable support d’innovation, technique, économique, sociale. Mais il est surtout important de constater qu’aucun des usages majeurs de l’internet d’aujourd’hui (sauf peut-être le jeu) n’est né de l’initiative des grands acteurs du domaine. Autrement dit, un réseau très contrôlé, qui n’admettrait (pour les meilleures raisons du monde) que des usages déjà identifiés, des services répertoriés a priori, ralentirait considérablement le rythme d’innovation.

La concurrence, nous le voyons tous les jours, est plus vive sur une infrastructure très neutre et ouverte, que lorsque quelques grands acteurs tiennent à la fois les routes, les bretelles d’accès, les octrois et même une partie des entreprises de transports. Ces grands acteurs sont nécessaires, mais il est indispensable que s’exerce sur eux la menace constante d’un bouleversement du marché.

Enfin, le coût d’appropriation d’un outil peut être la condition d’une certaine liberté, d’une nouvelle capacité d’agir pour les individus, les entreprises, les communautés. Pour les mêmes raisons, on apprend à conduire et nul ne s’en étonne. Si cet investissement est nécessaire pour que les internautes soient des citoyens actifs dans une société de la connaissance, faut-il en être chiches ?

Au bout du compte, ce sont les opérateurs, les fournisseurs d’accès et les industriels qui construiront l’architecture de l’internet de demain. C’est en cela que les choix sont avant tout économiques. Pour autant, le débat public peut éclairer ces choix et les acteurs publics disposent, s’ils le désirent, de nombreux moyens d’orienter l’intérêt économique des entreprises pour que celui-ci coïncide au mieux avec l’intérêt général.

Il est facile et tentant d’opposer les partisans d’un internet totalement décentralisé et ceux d’un réseau « géré ». La liberté contre le contrôle, le « bottom-up » contre le « top-down », les libertaires contre les réalistes, les informaticiens contre les utilisateurs…

Il est facile et tentant de radicaliser ces oppositions, d’en faire un débat philosophique ou politique. La réalité est plus prosaïque : au fond, il s’agit d’un choix économique.

Quatre constats nous semblent aujourd’hui incontestables :

1- Sous sa forme actuelle, l’internet a été et demeure un support d’innovation, voire de rêve, d’une efficacité sans précédent.

2- Le modèle décentralisé de l’internet s’est montré extraordinairement robuste. En 20 ans, l’internet est passé de quelques milliers à près d’un milliard d’utilisateurs ; son trafic a doublé chaque année ; il a supporté des applications de plus en plus diverses et exigeantes. Il ne s’est jamais effondré, aucune révision déchirante n’a été nécessaire.

3- Aujourd’hui, l’internet vit cependant une crise de croissance et a du mal à répondre aux quatre exigences qui émergent naturellement de son irruption au cœur de nos processus économiques et sociaux : la sécurité et la lutte contre les incivilités numériques (telles que le spam), la qualité de service, la rentabilité des acteurs qui en font leur métier, l’accessibilité à des utilisateurs que la technologie n’intéresse pas.

4- Le choix originel consistant à déporter l’intelligence aux extrémités du réseau, déporte également la complexité vers les utilisateurs. Il existe un énorme coût caché de l’internet, qui réside d’une part dans les équipements dont se dotent les utilisateurs, et d’autre part, dans le temps consacré à s’en approprier les concepts et les outils, à entretenir les outils, à traiter les problèmes rencontrés, etc.

On sait aujourd’hui que les questions techniques soulevées par la crise de croissance de l’internet peuvent trouver des réponses dans un modèle centralisé comme dans l’actuel modèle décentralisé. C’est donc dans l’analyse que l’on fera de ce coût caché que se trouve la clé de l’avenir.

Première question : pourrait-on, en re-centralisant certaines fonctions, faire baisser ce coût d’une manière significative, ou bien ne ferait-on que transférer les coûts d’un endroit à l’autre ? Rappelons qu’en téléphonie, l’on estime que les coûts liés à la gestion de systèmes complexes de comptabilisation, facturation, compensation, et aux services associés, représentent quelques 40 % de la valeur ajoutée des opérateurs.

Seconde question : à supposer que le coût d’un système décentralisé soit, à usages identiques, globalement supérieur à celui d’un système plus centralisé, le surcoût est-il justifié par d’autres bénéfices économiques et sociaux ? Nous pensons que c’est le cas, dans trois domaines : l’innovation, la concurrence et l’appropriation par les utilisateurs.

Nous l’avons dit, l’internet est un formidable support d’innovation, technique, économique, sociale. Mais il est surtout important de constater qu’aucun des usages majeurs de l’internet d’aujourd’hui (sauf peut-être le jeu) n’est né de l’initiative des grands acteurs du domaine. Autrement dit, un réseau très contrôlé, qui n’admettrait (pour les meilleures raisons du monde) que des usages déjà identifiés, des services répertoriés a priori, ralentirait considérablement le rythme d’innovation.

La concurrence, nous le voyons tous les jours, est plus vive sur une infrastructure très neutre et ouverte, que lorsque quelques grands acteurs tiennent à la fois les routes, les bretelles d’accès, les octrois et même une partie des entreprises de transports. Ces grands acteurs sont nécessaires, mais il est indispensable que s’exerce sur eux la menace constante d’un bouleversement du marché.

Enfin, le coût d’appropriation d’un outil peut être la condition d’une certaine liberté, d’une nouvelle capacité d’agir pour les individus, les entreprises, les communautés. Pour les mêmes raisons, on apprend à conduire et nul ne s’en étonne. Si cet investissement est nécessaire pour que les internautes soient des citoyens actifs dans une société de la connaissance, faut-il en être chiches ?

Au bout du compte, ce sont les opérateurs, les fournisseurs d’accès et les industriels qui construiront l’architecture de l’internet de demain. C’est en cela que les choix sont avant tout économiques. Pour autant, le débat public peut éclairer ces choix et les acteurs publics disposent, s’ils le désirent, de nombreux moyens d’orienter l’intérêt économique des entreprises que celui-ci coïncide au mieux avec l’intérêt général.

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