Sénégal : une élection biométrique en toc

Un système informatisé peut-il refuser à un citoyen de s’inscrire sur les listes électorales ? Quid de la fiabilité d’un système biométrique dès lors qu’on y trouve des doublons ? Est-il raisonnable d’envoyer, par courrier, sur une clef USB, un fichier électoral de 3,5 M de citoyens ? Ou sont passés les 1,5 M de personnes inscrites par ailleurs ? Autant de questions que pose la modernisation du système électoral sénégalais.

Carte électorale sénégalaiseAfin de pallier aux défauts de son état civil, de lutter contre les fraudes électorales et de garantir la fiabilité et la transparence des élections, le pays avait décidé de doter tous ses ressortissants en âge de voter de cartes d’électeurs comprenant entre autres leur photographie et un code barre identifiant leurs empreintes digitales, sur le modèle de leurs cartes d’identité numérisées.

Outre un petit scandale financier et quelques problèmes logistiques (à 15 jours du vote, 42 % des 5 millions de votants n’ont toujours pas reçu leurs cartes), le système est contesté par l’opposition, qui dénonce la présence de nombreux doublons. La commission nationale d’audit du fichier électoral reconnaît elle-même qu’elle « n’a pas réussi à s’accorder sur l’effectivité de la biométrie telle qu’utilisée pour assurer un contrôle absolument fiable des électeurs« .

Carte électorale du SénégalDe plus, près de 9000 Sénégalais ont été systématiquement rejetés par le système informatisé, ainsi qu’une grande partie de la population rurale et de la diaspora. Alors que près de 5 millions de personnes se seraient inscrites, le fichier, transmis par courrier (sic), sous la forme d’une clef USB (resic), à la Commission Electorale Nationale Autonome, chargée de la modernisation du système, ne comptabilisait que 3,4 millions d’inscrits.

En novembre dernier, le ministre de l’Intérieur se félicitait que « le Président Wade ait consenti sur le budget national un grand sacrifice afin de nous doter des équipements les plus modernes« . L’opposition réclame aujourd’hui l’utilisation d’un spray indélébile afin de « tatouer » les électeurs, et donc de les empêcher de voter plus d’une fois. En attendant, la refonte du fichier électoral sénégalais a coûté quelques 24 milliards de francs CFA (37 M d’euros).

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