Le marché des nanotechnologies serait-il largement surestimé ? Pour Michael Berger, de Nanowerk, depuis que la National Science Foundation a déclaré, en 2001, qu’il serait de 1000 milliards de dollars en 2015, on assiste à une véritable « course aux armements » de la part des sociétés de conseil ou d’investissement, qui n’hésitent pas à faire dans la surenchère : « d’abord on nous parle de nanotechnologies révolutionnaires (les nanorobots, par exemple), ensuite on nous dit que les experts ne savent pas si elles existeront ou non, et puis l’on nous explique que le marché attendra les 3000 milliards de dollars d’ici 8 ans ! » Alors que l’on dépense des fortunes en R&D, quid de l’industrie des nanotechnologies ?
Berger, qui entend démystifier ce marché, rappelle qu’on confond souvent les « nanotechnologies évolutionnaires » -qui améliorent des produits ou processus existants en y insérant des composants plus petits, ou bien en exploitant les possibilités offertes par la matière à l’échelle nano-, et les nanotechnologies « révolutionnaires » -qui visent à fabriquer, atome par atome ou molécule par molécule, systèmes, outils et produits. Ces dernières, visionnaires et encore hypothétiques, n’ont encore aucune perspective financière. Les premières, par contre, sont largement utilisées par des sociétés telles que L’Oréal, Toshiba, BMW, Nokia ou Bayer.
Mais Berger pointe une autre confusion, plus problématique : la confusion entre le marché des nanotechnologies et celui des produits qui incorporent des nanocomposants ! Ainsi, la société Lux Research estime qu’en 2010, le marché des nanomatériaux (nanotubes de carbone, nanoparticulers, etc.) devrait peser 3,6 milliards de dollars (contre 413 millions en 2005), et le « marché total des nanotechnologies » 1500 milliards de dollars. La société Cientifica estime de son côté que les semiconducteurs représentent la moitié des 2,95 trillions (milliers de milliards) de dollars du marché des nanotechnologies en 2015… tout en précisant que ce marché ne relève pas que des seuls nanocomposants, mais des produits dans lesquels ils sont insérés. Ainsi, plutôt que de compter les 10 centimes que coûtent le dixième de grammes de nanomatériaux utilisés dans un microprocesseur ou un médicament, les « études » préfèrent additionner la centaine de dollars que coûte l’objet dans son entièreté…