Quel avenir pour les « essaims de robots » ?

Dans nos colonnes nous avons souvent parlé des « essaims de robots » (par exemple ici, ou ici, ou encore, -plus inquiétant-, ici). Cette technologie inspirée de la vie artificielle et des sciences de la complexité, implique la création de dizaines, voire de centaines de petits robots, chacun possédant des capacités limitées, mais dont l’action coordonnée fait émerger des comportements complexes. Le roboticien Rodney Brooks désignait de tels ensembles de machines comme « fast, cheap and out of control » (rapides, pas cher et incontrôlés). De tels systèmes pourraient se montrer très utiles pour travailler dans des conditions extrêmes, dans des environnements étrangers comme d’autres planètes ou le fond des océans…

Dans The Conversation le chercheur Edmund Hunt (@DrEdmundHunt) s’interroge sur l’avenir de tels collectifs. Est-il possible de les rendre plus efficaces ?

Jusqu’ici, leur réalisation s’est surtout inspirée des insectes sociaux, comme les fourmis et les termites. Ces animaux réussissent en effet à bâtir des structures extrêmement complexes malgré leur tout petit cerveau. Le règne animal dispose-t-il d’autres exemples susceptibles de donner des idées aux concepteurs ? Une première solution consisterait à chercher du côté de la « culture animale », surtout présente chez des mammifères, comme les cétacés ou les primates. Mais cela serait probablement contre-productif. Ces organismes bénéficient de gros cerveaux, donc il faudrait, pour reproduire leur comportement, intégrer plus de capacités de calcul, voire de l’IA dans les machines de cet hypothétique collectif. Or, c’est précisément ce qu’on cherche à éviter lorsqu’on élabore de tels essaims : il faut que chaque membre du groupe soit aisément remplaçable, puisse travailler avec peu d’énergie, réagisse rapidement…

Mais il reste dans le champ du vivant d’autres possibilités qu’on n’a pas encore explorées.
La première, nous explique Hunt, est la « plasticité phénotypique ». Autrement dit, la capacité de certaines sociétés animales d’intégrer des spécimens possédant différentes caractéristiques. C’est ce qui se passe chez les très rares espèces d’araignées sociales. Par exemple, certains nids se composent d’animaux possédant deux types de personnalité, « audacieux » ou « timides ». Les araignées audacieuses se consacrent à attraper des proies, les « timides » s’occupent du nid et des petits.

On pourrait adapter cela pour les robots, explique Hunt. « Les robots pourraient être programmés en ajustant la prise de risque, avec des robots plus audacieux pénétrant dans des environnements dangereux, tandis que les plus timides se tiendraient à distance. Cela pourrait être très utile pour cartographier une zone sinistrée telle que Fukushima, y compris ses parties les plus dangereuses, tout en évitant d’endommager trop de robots de l’essaim en même temps. »

Les crapauds-buffles nous offrent un autre exemple de perfectionnement possible. Ceux-ci sont capables de s’adapter à différentes températures. Des robots s’inspirant de ces batraciens pourraient moduler leur consommation d’énergie, en fonction de la température ambiante et des paramètres externes, explique Hunt. Cela permettrait à tels collectifs de fonctionner beaucoup plus longtemps, et dans des conditions beaucoup plus variées, par exemple pour cartographier Mars, une planète ou le thermomètre affiche -150 degrés aux pôles et +20 à l’équateur.

Enfin, certaines bactéries sont capables de changer de forme. On pourrait envisager des groupes de robots s’associant pour adopter différentes configurations adaptées à leur tâche ou à leur environnement (cela fait penser au projet Symbrion, qui fut un temps lancé par l’Union Européenne).

Quoi qu’il en soit, conclut Hunt, cette technologie a de beaux jours devant elle et pourrait nous aider à relever de nombreux défis auxquels l’humanité est confrontée : changement climatique, catastrophes d’origine naturelle ou artificielle, conquête de l’espace…

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