“La pleine conscience promeut une conception individualiste de la société”

Dans une tribune au Monde, Mathieu Detchessahar, professeur à l’Institut d’économie et de management de l’université de Nantes et membre du conseil scientifique de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) développent des arguments contre les effets sociaux de “la méditation de pleine conscience”, cette nouvelle mode de la méditation qui envahie le management. Cette méthode pour gérer le stress, propose aux gens de développer leur intériorité plutôt que de résoudre la montée des exigences de performance, l’accélération du rythme des changements et la réduction des marges de manoeuvre en entreprise. La pleine conscience alimente le business des consultants et se révèle bien loin des sagesses dont elle s’inspire qui prônent le détachement du monde et la maîtrise des désirs.

“Enfin, le discours qui accompagne la diffusion de la mindfulness dans les milieux d’affaires promeut une conception individualiste de la société. Chacun de ses promoteurs prend soin de souligner son caractère laïque et universaliste. La mindfulness, insistent-ils, ne renvoie à aucune religion, aucun dogme, aucune culture. Elle est ouverte à tous, elle n’impose rien ! Certes.

Mais il faut alors comprendre qu’elle n’est le support d’aucune communauté concrète, vécue, reliant les personnes les unes aux autres autour d’une éthique ou d’un projet collectif. Il s’agit d’une pratique individuelle, ne renvoyant qu’à soi et à sa propre efficacité ; le dernier avatar, en somme, de l’individualisme marchand. Voilà une pratique parfaitement adaptée à un monde décommunautarisé, désinstitutionnalisé, constitué d’individualités juxtaposées auxquelles l’on fait croire qu’elles ne peuvent attendre leur bonheur que d’elles-mêmes. A méditer…”

À lire aussi sur internetactu.net