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Le week-end dernier, Libération publiait un article sobrement intitulé « Une puce sous la peau », et décrivant comment une boîte de nuit barcelonaise envisage de généraliser l’implant de puces Rfid dans le bras de ses clients (http://www.liberation.com/page.php?Article=221012). Les puces, de la taille d’un grain de riz, serviront à la fois à montrer « patte blanche » à l’entrée de l’établissement, et à payer ses consommations, le compte bancaire du client étant instantanément débité, sans avoir eu à sortir sa carte bancaire.

Dans un autre domaine, Arnaud Belleil (*) aime à souligner combien les coureurs de marathon (dont il est) apprécient désormais d’accrocher de minuscules puces-émetteurs aux lacets de leurs chaussures (http://www.championchip.com). Dans ce cas, les puces servent aux coureurs pour connaître avec précision leur temps intermédiaire, et permettent à leurs proches de les suivre en temps réel sur l’internet.

Dans les deux cas, on s’éloigne de la vision manichéenne selon laquelle les tentatives d’identification électronique des individus émanent d’un improbable Big Brother. Au contraire, on voit combien ces technologies trouvent des utilités multiples, et sont même acceptées – voire plébiscitées – par les usagers. « De quoi voulez-vous que j’aie peur ? », demande l’un des futurs implantés de la discothèque de Barcelone. Que lui répondre ? Les discours alarmistes des associations de défense des libertés individuelles ne seraient-ils pas disproportionnés, face à un usage limité, pratique et apparemment inoffensif des puces d’identification ? Faut-il pousser des cris d’orfraie face à ce qui ressemble étrangement à du « taggage humain », ou simplement admettre combien un système évitant d’emporter avec soi pièces d’identité et moyens de paiement est objectivement utile ?

Et l’on en vient à comprendre que les technologies les plus « théoriquement effrayantes » cessent de l’être quand elles trouvent place dans notre quotidien.

On entrevoit alors que le risque, s’il y en a un, ne viendra pas d’un quelconque organe centralisé et aux pouvoirs tentaculaires, cherchant à imposer un contrôle planétaire. Il viendra bien davantage de notre acceptation, de notre passivité ou de notre indifférence à l’égard de technologies d’identification qui sont bel et bien en cours de banalisation.

En devenant pervasives, invisibles, habituelles, ces technologies masquent leur caractère potentiellement négatif derrière leurs avantages. Quoi de plus naturel qu’un titre de transport qu’on garde au fond d’une poche ou d’un sac pour franchir les portillons du métro ? Quoi de plus pratique qu’une puce sous la peau, en remplacement d’un portefeuille et d’un porte-clé ?

Personne, aucun état ou aucune entreprise, n’imposera des technologies d’identification des personnes. Ce sont les individus, nous tous, qui les imposeront, en leur trouvant une utilité et un intérêt dans notre vie de tous les jours. Toute la question est donc de savoir si nous aurons envie – ou si nous serons capables – de mesurer, en pleine conscience, toute l’ambivalence de ces technologies.

Cyril Fiévet

(*) Intervenant lors des rencontres d’Hourtin en 2003, Arnaud Belleil proposait déjà une réflexion sur la manière dont « les puces sous-cutanées pourraient être acceptées par la population, par un phénomène d’accoutumance progressive, du fait d’usages sociaux apparaissant comme légitimes » : http://www.fing.org/index.php?num=4192,4#belleil »

Le week-end dernier, Libération publiait un article sobrement intitulé « Une puce sous la peau », et décrivant comment une boîte de nuit barcelonaise envisage de généraliser l’implant de puces Rfid dans le bras de ses clients (http://www.liberation.com/page.php?Article=221012). Les puces, de la taille d’un grain de riz, serviront à la fois à montrer « patte blanche » à l’entrée de l’établissement, et à payer ses consommations, le compte bancaire du client étant instantanément débité, sans avoir eu à sortir sa carte bancaire.

Dans un autre domaine, Arnaud Belleil (*) aime à souligner combien les coureurs de marathon (dont il est) apprécient désormais d’accrocher de minuscules puces-émetteurs aux lacets de leurs chaussures (http://www.championchip.com). Dans ce cas, les puces servent aux coureurs pour connaître avec précision leur temps intermédiaire, et permettent à leurs proches de les suivre en temps réel sur l’internet.

Dans les deux cas, on s’éloigne de la vision manichéenne selon laquelle les tentatives d’identification électronique des individus émanent d’un improbable Big Brother. Au contraire, on voit combien ces technologies trouvent des utilités multiples, et sont même acceptées – voire plébiscitées – par les usagers. « De quoi voulez-vous que j’aie peur ? », demande l’un des futurs implantés de la discothèque de Barcelone. Que lui répondre ? Les discours alarmistes des associations de défense des libertés individuelles ne seraient-ils pas disproportionnés, face à un usage limité, pratique et apparemment inoffensif des puces d’identification ? Faut-il pousser des cris d’orfraie face à ce qui ressemble étrangement à du « taggage humain », ou simplement admettre combien un système évitant d’emporter avec soi pièces d’identité et moyens de paiement est objectivement utile ?

Et l’on en vient à comprendre que les technologies les plus « théoriquement effrayantes » cessent de l’être quand elles trouvent place dans notre quotidien.

On entrevoit alors que le risque, s’il y en a un, ne viendra pas d’un quelconque organe centralisé et aux pouvoirs tentaculaires, cherchant à imposer un contrôle planétaire. Il viendra bien davantage de notre acceptation, de notre passivité ou de notre indifférence à l’égard de technologies d’identification qui sont bel et bien en cours de banalisation.

En devenant pervasives, invisibles, habituelles, ces technologies masquent leur caractère potentiellement négatif derrière leurs avantages. Quoi de plus naturel qu’un titre de transport qu’on garde au fond d’une poche ou d’un sac pour franchir les portillons du métro ? Quoi de plus pratique qu’une puce sous la peau, en remplacement d’un portefeuille et d’un porte-clé ?

Personne, aucun état ou aucune entreprise, n’imposera des technologies d’identification des personnes. Ce sont les individus, nous tous, qui les imposeront, en leur trouvant une utilité et un intérêt dans notre vie de tous les jours. Toute la question est donc de savoir si nous aurons envie – ou si nous serons capables – de mesurer, en pleine conscience, toute l’ambivalence de ces technologies.

(*) Intervenant lors des rencontres d’Hourtin en 2003, Arnaud Belleil proposait déjà une réflexion sur la manière dont « les puces sous-cutanées pourraient être acceptées par la population, par un phénomène d’accoutumance progressive, du fait d’usages sociaux apparaissant comme légitimes » : http://www.fing.org/index.php?num=4192,4#belleil »

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