Canarie, le réseau pancanadien de la recherche

www.canarie.ca

Présentation de Canarie. Le réseau actuel  : Ca*Net3. CA*Net4, le réseau du futur Une vision pour l’avenir et pour le Canada. Applications avancées sur Canarie. Canarie sur le Web. Susan Baldwin, directrice des opérations  ; James Rossiter, directeur du Programme d’apprentissage  ; Rafiq Khan, directeur principal, élaboration des stratégies

(Voir aussi la rencontre de Jean-Michel Cornu avec l’« architecte en chef » René Hatem : http://www.fing.org/index.php?num=2458,1)

Présentation de Canarie

Canarie conçoit et exploite le réseau pan-canadien de l’enseignement supérieur et de la recherche. C’est une entreprise à but non-lucratif dont le Conseil se compose pour moitié d’acteurs publics et pour moitié d’entreprises. L’organisation compte 100 membres (essentiellement des universités) et emploie 30 personnes.

Objectifs  :

·         Accélérer le développement, mais aussi l’évolution des technologies

·         Favoriser le développement d’applications nouvelles  : « Visiting the future and reporting back » (« Explorer le futur et en rendre compte »)

·         Favoriser le développement d’applications avancées dans le secteur public tels que l’éducation et la santé

Le réseau est donc à la fois un réseau en exploitation, un banc d’essai de technologies nouvelles et un support d’expérimentation d’applications avancée. Il fonctionne au niveau pan-canadien, et raccorde donc entre eux les réseaux des différentes provinces.

Le financement vient principalement du ministère de l’Industrie, mais de plus en plus de ministères s’intéressent aussi à Canarie, notamment autour des applications  : ainsi, le nouveau projet e-Content est financé par le département du Patrimoine.

Canarie est mieux connu hors du Canada qu’à l’intérieur. Il est un modèle pour beaucoup de pays dans la conception et la mise en œuvre de réseaux avancés.

Le réseau actuel  : Ca*Net3

CA*Net 3 est un réseau large bande conçu en 1998 par Canarie pour desservir la communauté de l’éducation et de la santé au Canada (collèges, universités, hôpitaux, bibliothèques). Il n’est accessible au secteur privé que si l’entreprise porte un projet spécial qui a besoin de très hauts débits (ex. bioinformatique, contrôle d’une fabrique de microprocesseurs). Originellement dédié à l’enseignement supérieur, Canarie évolue de plus en plus vers le branchement des écoles  : toutes les nouvelles écoles de la Colombie Britannique et du New Brunswick sont ainsi raccordées à CA*Net 3.

Structure du réseau

Les objectifs de départ étaient les suivants :

·         Fournir un réseau de pointe

·         Démontrer les capacités technologiques des entreprises et scientifiques canadiens

·         En coopération avec les opérateurs et industriels (Bell Nexia, Nortel, Cisco, JDS Uniphase, Alcatel Canada), démontrer une nouvelle approche plus efficace et moins coûteuse  : CANet3 devait être le premier réseau à faire du IP directement dans la fibre optique, ce qui élimine un grand nombre de couches intermédiaires (SONET, ATM… issus du monde de la voix). Canarie est ainsi le premier réseau conçu dès l’origine autour des données, ce qui augmente les performance et réduit considérablement les coûts.

Le réseau s’articule autour de deux liaisons nationales redondantes en fibre optique, avec une capacité de plusieurs dizaines de Gbps. CA*Net3 ne connecte pas directement des institutions, mais des réseaux régionaux (tels que RISQ au Québec) auxquels se connectent les utilisateurs. Toutes les organisations qui se branchent sur CA*Net doivent maintenir une connexion séparée à l’ internet commercial  : CA*Net 3 est un réseau « privé » dédié à la communauté de l’enseignement et de la recherche.

CA*Net 3 est raccordé aux autres réseaux de la recherche (GEANT en Europe) via les nœuds rapides de NYC, Seattle et Chicago (StarTAP).

Contrairement à la plupart des réseaux à très haut début expérimentés ou déployés dans le monde, CA*Net n’explore pas la piste de la « Qualité de service » (QoS). Selon les architectes de Canarie, la tendance est à une bande passante illimitée (« loi de Gilder ») et il est en réalité plus simple, plus rapide et moins coûteux d’ajouter de la bande passante, que de gérer le trafic de manière « intelligente ».

CA*Net4, le réseau du futur

Fin décembre 2001, Canarie annonçait avoir obtenu du gouvernement fédéral 110 M C$ pour entamer le déploiement du réseau CA*Net 4, qui doit succéder à CA*Net 3.

Pourquoi  ?

La communauté de recherche a besoin d’une infrastructure qui puisse la supporter dans ses divers besoins de recherche. Or de nombreux besoins scientifiques vont faire croître de manière considérable les besoins  :

–         Wavelength disk drive  : optimiser la distribution des données entre ordinateurs (voir www.fing.org/index.php?num=851,4)

–         Stockage distribué

–         Télévision haute définition non compressée (exemple du concert joué par deux membres d’un duo séparés de plusieurs centaines de kilomètres  : la synchronisation exige des délais de latence très faibles, ce qui interdit de recourir à la compression)

–         Synchrotron

–         Observatoire numérique Gemini (www.gemini.edu), qui relie plusieurs télescopes répartis dans le monde

–         « Technologies forestières de pointe » du Centre de foresterie du Pacifique (www.aft.pfc.forestry.ca/index_f.html)  : mise à jour des cartes et de l’inventaire forestier, détermination de la chimie du couvert et des feuilles ou de la biomasse à l’aide des données satellitaires, élaboration de systèmes de gestion du paysage…

Les technologies de « grille » (Grid), qui associent plusieurs ordinateurs en réseau pour accomplir des tâches de tous ordres, font partie des développements les plus prometteurs sur lesquels Canarie est actif.

Plusieurs réseaux de recherche nationaux ou régionaux (SurfNet aux Pays Bas, Iwire à Chicago, Pacific Light Rail à l’université de Washington…) sont ainsi en train de constituer des « lambda grids », une sorte de « pool » de fibres noires ou de longueurs d’ondes disponibles pour des applications ayant besoin de très hauts débits.

–         Exemple du teragrid  : une longueur d’onde réservée qui forme le « bus » qui relie différents ordinateurs

–         Grid for High Energy Physics (physique des hautes énergies, en collaboration avec le CERN)  : un réseau en constitution qui distribuera des Petaoctets dans le monde entier

–         Et beaucoup d’autres projets rassemblés sous le label « e-Science ». Par exemple, des senseurs sont installés sur les toits d’écoles primaires pour capter des rayonnements cosmiques  : lorsqu’il y a un bombardement, les données sont envoyées à l’université d’Alberta et analysées  ; les élèves adorent cette participation active à la science.

Principes de base de CA*Net4

Les réseaux de recherche et d’éducation doivent être à l’avant-garde. La plupart des réseaux haut débit dans le monde se focalisent sur la « qualité de service » (MPLS), il s’agissait de tester d’autres approches  : permettre aux institutions de détenir et d’exploiter leur propre fibre, voire leur propre longueur d’onde.

C’est le principe du « Customer-empowered network » (réseau exploité par l’utilisateur)  : l’utilisateur qui se branche au réseau contrôle la mise en place et la terminaison de lambdas (longueurs d’ondes) reliant leur institution à une autre. C’est en quelque sorte une extension du principe « pair à pair » de l’internet, non plus au monde des applications (comme dans le cas de Napster et de ses émules), mais à celui des réseaux physiques. En d’autres termes encore, le réseau cesse d’être un service pour devenir un bien, un capital (asset), une pure infrastructure.

Alors qu’aujourd’hui, pour construire un réseau privé virtuel (VPN) il faut passer par un lieu central, dans l’architecture de CA*Net 4 chaque utilisateur possède sa propre longueur d’onde. Il n’y a pas de nuage central. Une institution peut en quelque sorte étendre son LAN (réseau local) presque à l’infini…

–         Exemple des réseaux métropolitains en copropriété. Le réseau affecte un ensemble de longueurs d’onde à ses clients, qui peuvent en affecter à des utilisateurs individuels.

Canarie imagine que cette conquête de l’autonomie (empowerment) sur les réseaux pourrait avoir un impact similaire (en termes de nouvelles applications) à celui qu’a représenté l’arrivée PC après l’époque des mainframes.

Canarie compte aider financièrement les institutions d’éducation et de recherche à expérimenter et comprendre ce principe nouveau. En revanche, contrairement à ce qui a pu être avancé, Canarie soi-même n’étendra pas son soutien ni son offre de connexion jusqu’aux collectivités territoriales  : tout en affirmant que c’était une affaire de temps et non de principe, les opérateurs télécoms ont mal réagi à cette possibilité.

Canarie voudrait cependant étendre sa connexion à d’autres institutions, par exemple des lieux de création, des musées…

Architecture technique

A première vue, l’architecture ressemble à celle de CA*Net3. Mais à la différence de CA*Net 3 qui louait des liaisons à des opérateurs, il s’agit d’un réseau physique (couche 1), pas seulement d’une couche IP sur une infrastructure louée.

Les nœuds sont des commutateurs optiques, chacun fonctionnant comme un point d’échange complet qui permet d’établir des liaisons de point à point  : des « mini-IX ».

Le contrôle de la commutation est transféré à l’utilisateur final au travers de ces « mini-IX » auxquels tout le monde est connecté et qui permettront à l’utilisateur de maîtriser ses « routes ».

Canarie développe ainsi un concept (et les protocoles associés, dénommés OBGP, Optical Border Gateway Protocol) de « Réseautage orienté objet »  : on lance une application qui de manière transparente fait une demande pour une ou plusieurs lambdas… le réseau devient une composante d’un programme informatique.

Une vision pour l’avenir et pour le Canada

Rafiq Khan, directeur principal, élaboration des stratégies

Les 5 objectifs de CA*Net 4

Canarie est une petite organisation mais elle rassemble certains des meilleurs esprits du pays, avec une sorte de zèle missionnaire. Elle fonctionne sur un modèle de coopération, dont la coopération public-privé. Elle agit entre autres comme un think tank, un « courtier » de visions sur le futur.

·         Un réseau supportant la recherche scientifique

·         Constituer la fondation d’une infrastructure d’innovation pour le pays, pour promouvoir une culture de l’innovation à travers des applications avancées telles que le téléapprentissage, l’e-Science…

·         En partenariat avec l’industrie, développer de nouveaux protocoles et technologies pour que les utilisateurs à l’extrémité du réseau puissent gérer leur propre longueur d’onde.

·         Fournir une infrastructure de déploiement, d’expérimentation et de test des équipements des entreprises canadiennes du secteur.

·         Développer des bourses d’échange de lambdas (longueurs d’onde)…

Pourquoi faire tout cela  ? La productivité. Dans nos économies de services, les TIC sont la principale source de productivité. Les réseaux, ainsi que les applications et contenus associés, sont les outils de cette productivité.

La dynamique économique

Les réseaux font 2 choses  : ils éliminent la distance, ils éliminent les intermédiaires. Producteurs et consommateurs se rapprochent, dans un « capitalisme sans friction ». C’est un puissant outil de changement social et économique.

Canarie propose un nouveau paradigme du réseautage  : il s’agit de déplacer le pouvoir du centre vers les extrémités.

Economiquement, en éliminant beaucoup d’équipements intermédiaires, les concepts de CA*Net 4 réduisent le coût de production de la bande passante d’un ordre de grandeur de 90 %  : on va vers un coût marginal de la bande passante à peu près nul. Il devient économiquement viable d’allouer de la bande passante à la demande, presque sans contrainte.

Applications avancées sur Canarie

Phases 1 et 2  : 200 projets financés.

Canarie s’est surtout consacré au réseau physique, mais l’organisation s’intéresse aussi aux applications. Près de 200 projets d’applications ont été co-financés (à 50 %, avec un maximum de 2 M C$) depuis le démarrage. Cependant, en dehors des projets directement financés par Canarie, le recensement des usages des universités ne fait que commencer.

Aujourd’hui, Canarie s’intéresse de plus en plus au contenu. La démarche a consisté à s’intéresser aux inhibiteurs qui limitent la diffusion des usages. D’où 3 priorités  :


·         E-Business (http://www.canarie.ca/programmes/ecomm.html) : 30 M C$ sur 4 ans

Il n’y a pas aujourd’hui beaucoup d’applications large bande dans ce domaine. Les projets recherchés concernent essentiellement la refonte complète de la gestion des chaînes d’approvisionnement.

5 projets ont pour l’instant été retenus, par exemple dans la construction ou la distribution. S’agissant de projets co-financés par des entreprises, l’apport de Canarie se fait en avances remboursables.

·         E-learning (James Rossiter)  :

Le programme se place dans la perspective d’une bande passante disponible, abondante et gratuite  : dans quels domaines les réseaux avancés ajoutent-ils réellement de la valeur dans les projets d’enseignement  ? 26 à 28 M C$ sont affectés à des projets destinés à réduire les barrières structurelles  : juridictionnelles (faire travailler ensemble les provinces, les institutions), pédagogiques…

14 projets ont été retenus (cf. http://www.canarie.ca/programmes/learning.html), parmi lesquels  :

–         Repository of learning objects  : au fur et à mesure que des matériaux d’apprentissage se mettent en ligne, on s’aperçoit que certaines des démarches les plus efficaces sont celles qui consistent à mettre en ligne des petits modules (« objets »  : un texte, un clip, une ressource…) rendus accessibles aux enseignants, élèves… Mais il faut pouvoir identifier ces ressources, les catégoriser. C’est la question des métadonnées. Le standard émergent dans ce domaine, IMS, est très riche mais complexe. Canarie développe une version simplifiée (CanCore), compatible et plus simple à utiliser. Le programme permet aussi de mettre en place des répertoires de ressources, avec pour objectif de développer un répertoire pancanadien, sous forme fédérative.

–         Les 4 collèges de médecine vétérinaire du Canada sont très éloignés les uns des autres. Ils doivent enseigner des compétences très diverses dans un contexte de pénurie de professeurs. Le projet permet de « partager les ressources-enseignants ». C’est totalement inhabituel, d’autant que ces collèges sont dans des fuseaux horaires différentes. Développent aussi des modules asynchrones pour partager.

Ainsi, chaque semaine un cours de pathologie est partagé entre tous les collèges. Chaque semaine un collège prépare une lamelle à étudier au microscope que tous les étudiants doivent interpréter, ce qui ne peut pas être fait sans une très haute qualité d’image.

–         L’un des problèmes les plus pressants au Canada est celui d’un manque d’enseignants à tous les niveaux. Donc il faudra faire le meilleur usage de la ressource rare qui n’est pas la bande passante, mais le temps des enseignants. Par exemple un enseignant en composition musicale et un autre en direction d’orchestre se « partagent » des étudiants sur deux lieux.

–         En matière de multilinguisme, peu de projets ont pour l’instant été proposés, mais les choses changent. L’investissement en cours de numérisation du patrimoine, qui se fera en deux langues, va beaucoup aider.

Il y a aussi un projet d’enseignement d’une seconde langue.

·         E-Sante  : le Canada dépense 75 Mds C$ sur la santé, de manière peu productive. L’objet du programme (http://www.canarie.ca/programmes/sante.html), doté de 5 M C$, est de contribuer à améliorer cette situation. 

·         Contenu électronique : Recherche appliquée sur les médias interactifs (RAMI), un programme de 6 M C$ qui vise à « Favoriser la recherche et l’élaboration d’applications dans le secteur des médias interactifs, et intensifier la création de contenu avancé pour les réseaux » (www.canarie.ca/programmes/rami.html).

Ce programme a été élaboré à la suite d’un rapport de juillet 2001  : « Filling the Pipe : Stimulating Canada’s Broadband Content Industry through R&D » (http://www.canarie.ca/press/releases/01-07-27.html)

·         7 autres programmes existent par ailleurs (www.canarie.ca/programmes/programmes.html)

Canarie est intéressé par des coopérations internationales et encourage les projets à travailler avec d’autres pays, y compris des PVD. Plusieurs coopérations existent avec l’Europe.

Canarie sur le Web

·         Site officiel  : http://www.canarie.ca

·         Centre d’exploitation de CA*Net 3  : http://www.canet3.net/

·         Articles et contributions moins officielles de Bill St Arnaud  : http://www.canet3.net/news/news.html

À lire aussi sur internetactu.net