Peut-on rêver l’école et mieux la construire ?

« J’habite au nord des Pays-Bas dans une petite ville de 27 000 habitants, je me déplace beaucoup par train et c’est souvent là mon bureau. Je n’ai pas de diplôme, mais cela ne m’a pas empêché de mettre en place un programme de cours pour l’Académie Royale d’Art de La Haye. Je suis designer et je cherche à montrer comment le monde change et comment on peut utiliser bénéfiquement ces changements. Comme beaucoup de gens, je travaille pour gagner ma vie et j’essaye d’organiser des choses drôles et agréables. » C’est ainsi que se présente le touche-à-tout Marcel Kampman. Ne vous fiez pas à son apparente modestie, ce designer fou a beaucoup de projets dans sa besace et tous ne sont pas aussi fous qu’ils en ont l’air. Il est notamment le directeur créatif de Picnic, la conférence hollandaise sur les nouvelles technologies, et le cofondateur de DreamSchool. Et c’est de ce projet qu’est venu parler Marcel Kampman à l’édition 2011 de Lift, une des autres grandes conférences européennes sur l’innovation.

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Image : Marcel Kampman sur scène et dans sa présentation, à Lift.

DreamSchool (l’école de rêve) est née d’une rencontre avec un directeur d’école hollandais qui était venu l’écouter à une conférence. Le principal avait le projet de bâtir « une école idéale » (une école pour les 12-18 ans : on dirait plutôt un collège chez nous). Les deux hommes se sont trouvé alors des buts communs. Le principal, Peter de Visser, était passionné par son projet : « il voulait bâtir une école autrement pour changer le monde, en commençant par ici », à Mepel aux Pays-Bas où les deux hommes vivent. Le but était terriblement ambitieux : comment créer la meilleure école des Pays-Bas, voir du monde entier ? ! Pour réfléchir à ce projet, Marcel Kampman à fait bénéficier au directeur de son formidable réseau, demandant à des artistes et aux meilleurs spécialistes du sujet – Ken Robinson, qui explique que l’école anéantit la créativité, Jeff Jarvis ou John Moravec… – ce qu’il fallait faire pour concrètement réussir ce projet.

Si les rêves sont sans fin, construire une école ne l’est pas. Il y a des contraintes et des législations à respecter. Le projet Ecole de rêve devait à la fois permettre une réflexion théorique et la confronter à une situation réelle.

Marcel Kampman explique que l’école tue la créativité des enfants. Qu’elle participe – comme tous les choix qu’on fait pour eux – à réduire le plein potentiel que les enfants ont à la naissance. « On obtient un diplôme pour ce que nous ne sommes plus », lance-t-il en reprenant les thèses de Ken Robinson. Le groupe de travail qui s’est formé autour du projet, lui, a pris le contre-pied. Il a eu pour objet de libérer la créativité des participants via des ateliers de créativité et une plateforme pour y déposer ses « rêves d’école idéale ». L’enthousiasme semble communicatif : « Tous les participants s’engagent à créer quelque chose. Créer une école de rêve est un vrai défi et nous n’avons qu’une chance pour la faire fonctionner. D’ici 3 ans, elle sortira de terre pour fonctionner réellement. »

Dommage que Marcel Kampman s’en tienne aux généralités. Nous aurions aimé savoir plus précisément les principes fondateurs qui vont régir cette école, son organisation, comme son aménagement. Visiblement, si l’on croit un billet que lui a consacré John Moravec, la classe traditionnelle sera abandonnée au profit d’espaces flexibles favorisant la collaboration. Une infrastructure technologique sera bien sûr mise en place, mais sans qu’elle soit imposée : les élèves seraient libres d’apporter leurs propres technologies, certainement en recevant une bourse pour cela. L’école serait également une ressource pour la communauté tout entière : permettant à d’autres qu’aux seuls élèves de bénéficier de la structure mise en place, le soir après les cours notamment. Enfin, elle engagerait des enseignants qui plutôt que d’être chargés de faire des cours, auraient pour but d’être les médiateurs d’idées, les catalyseurs de la créativité et de l’innovation des élèves…

« C’est un sujet sérieux », conclut Marcel Kampman. « Nous ne cherchons pas à tuer le concept d’école, mais à l’aider à se développer ». Le réseau est ouvert. Visiblement, d’autres écoles de part le monde cherchant elles aussi à imaginer une école idéale l’ont rejoint pour travailler de concert.

Avec les rêves, tout semble effectivement possible, mais tout le monde aura hâte de regarder dans quelques années, si « l’école de rêve » les relève.

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0 commentaires

  1. Ce n’est pas inintéressant, mais on a un peu l’impression que les créateurs de cette « Dreamschool » découvrent à peine ce que d’autres font déjà depuis plusieurs dizaines d’années. Ces réflexions sur la créativité à l’école sont loin d’être neuves, et la Dreamschool ferait bien de s’inspirer des écoles Steiner, Montessori, Freinet plutôt que repartir de zéro… Voyez aussi ce que fait l’école du centre des Amanins. Ces genres d’initiatives autour d’une « nouvelle école » se comptent déjà par centaines…

  2. Oui effectivement, ça peut aussi être le cas… Ca reste en tout cas intéressant.

  3. Les écoles issus des pédagogies actives, nées il y a presque un siècle, sont aujourd’hui très minoritaires, et pourtant, elles vont dans le courant d’idées Open Source et émancipatrices. La pédagogie de Freinet me semble très intéressante à explorer, tant le pédagogue, dès le début, n’a pas hésité à utiliser les techniques et moyens de son temps. La pédagogie laisse la possibilité d’exploiter de nouvelles techniques et technologies, de nouveaux dispositifs de TICE… De plus, il prônait des idées humanistes d’apprentissages collectifs.

    J’imagine bien — j’espère — que Marcel Kampman a étudié toutes les tentatives pédagogiques alternatives de l’histoire, car s’il compte refaire toute l’école, c’est qu’il estime que ces méthodes ne sont plus adéquates.
    Mais s’il a effectivement fait ces recherches, il sait aussi que toutes ces tentatives n’ont pas été que des succès, et que certaines ont coûté la jeunesse de certains élèves.
    A bon entendeurs…

  4. Si « l’école annéantie la créativité », au moins elle enseigne l’orthographe…

    Hélas, pas si bien ;-). Merci pour le repérage de la faute. – HG