Vers une science de l’échec

Quelles sont les lois du succès ? Grande question qui a obsédé de nombreux penseurs et chercheurs, et les études sur les données concernant la réussite sont nombreuses, nous raconte la Technology Review.

Mais peut-être faut-il se poser la question inverse : pourquoi certaines entreprises échouent-elles ? Là, les études sont bien moins nombreuses, mais le travail de Yian Yin, chercheur en systèmes complexes à l’université Northwestern d’Evanston dans l’Illinois, pourrait combler cette lacune. Les travaux de son équipe ont été publiés dans ArXiv.

Pour étudier les mécanismes de l’échec, ce chercheur s’est basé sur trois différents jeux de données. Le premier est l’ensemble de demandes de subventions en matière de recherche médicale soumises à l’institut américain de la santé. Le second ensemble est issu de VentureXpert, une base de données des investissements dans les startups. Le dernier jeu liste tous les attentats terroristes effectués entre 1970 et 2017.

Pour la recherche médicale, le succès était caractérisé par une subvention effectivement accordée. Une startup était considérée comme ayant réussi si dans les cinq ans suivant sa création, elle était introduite en bourse ou se faisait acquérir pour une forte somme.
Quant aux attentats terroristes, ils devaient causer la mort d’au moins une personne pour être considérés comme réussis.

A l’aide de ces données, Yian Yin et son équipe ont pu tester plusieurs modèles. Ils se sont basés pour cela sur le nombre de tentatives effectuées par des personnes ou un groupe avant de réussir leur tentative. Quels changements avaient eu lieu entre le premier échec et la réussite finale ? Cela pouvait n’être qu’une question de chance. Dans ce cas, il suffit de tenter et tenter encore jusqu’à ce que les choses fonctionnent. Mais l’analyse du modèle ne donne rien qui confirme cela. Du reste, les chercheurs ont pu constater que l’avant-dernière tentative était en général plus proche de la réussite que la première. Il n’y aucune raison que la chance seule soit à l’origine de cela. Donc la réponse qui semblait s’imposer était la notion d’apprentissage. Les gens font de mieux en mieux jusqu’à la réussite finale.

Malheureusement, cet autre modèle n’est pas non plus confirmé par les données.

Yian Yin et son groupe ont alors testé un troisième modèle : les groupes analysés apprennent-ils correctement de leurs échecs ? Pour cela, ils ont établi une échelle allant de ceux qui prennent systématiquement compte les leçons du passé à ceux qui au contraire n’y accordent aucune importance.

Ils ont ainsi pu distinguer un effet de seuil, et une transition de phase. En dessous d’un certain niveau, le groupe en question pourra multiplier les tentatives sans jamais réussir son entreprise (la qualité du travail de ces groupes peut même se dégrader avec le temps, nous précise la Technology Review). Au-dessus de celui-ci, en revanche, on s’approche de plus en plus du succès jusqu’au triomphe final.

Ce n’est donc pas simplement le fait d’apprendre qui fait progresser, mais la façon dont on apprend. Dans ce domaine, certains groupes se révèlent meilleurs que d’autres. Et surtout, il est possible à l’aide de cette recherche de prédire dès les premières tentatives quel sera le destin de l’entreprise en question. Comme l’expliquent les chercheurs : « «Nos résultats révèlent des signaux précoces identifiables, mais jusqu’alors inconnus, nous permettant d’identifier la dynamique des échecs qui mènera à la victoire ou à la défaite ultime». Prochaine étape, selon la Technology Review. Analyser les méthodes d’apprentissage utilisées par les différents groupes pour comprendre les raisons de cette différence de dynamique.

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