Le jeu comme outil d’autoréalisation

Les jeux vidéo satisfont les besoins humains fondamentaux ! C’est ce qu’affirme le journaliste et écrivain Simon Parkin (auteur du livre Death by video games : Danger, Pleasure, and Obsession on the Virtual Frontline) dans un récent article pour la revue Nautilus.

Et Parkin de commencer son texte en nous parlant de… Grand Theft Auto, jeu souvent qualifié d' »immoral » qui n’apparaît pas comme un exemple de satisfaction de nos besoins fondamentaux. Du moins on l’espère. Or, nous dit Parkin, les multiples actions peu sympathiques qu’on est susceptible d’accomplir au sein de ce jeu ne sont pas nécessaires pour gagner. Ce sont juste des choix possibles au sein d’un univers virtuel qui offre bien d’autres opportunités. En se sens, un jeu comme Grand Theft Auto ne fait que matérialiser notre conception du monde et nos attentes. « Si vous êtes plein de haine dans le monde réel, le jeu fournit un espace dans lequel agir avec haine. »

Parkin déterre un article de 1996 sur les MUDs (pour Multi-User Dungeon), écrit par Richard Bartle, un chercheur en intelligence artificielle qui fut aussi l’un des premiers concepteurs de ce type de jeu. Rappelons que les MUDs furent, dans les années 80-90, le prototype des MMORPGs, les univers de type World of Warcraft. Dans des univers virtuels existant la plupart du temps exclusivement en mode texte, les joueurs vivaient les aventures de leur « avatar » dans un univers de fantasy ou de SF.

Dans son papier, Bartle distingue 4 types de joueurs : les « tueurs », les « performants », les « socialisateurs », et les « explorateurs ». Or, selon Bartle, les joueurs conserveraient ce trait de caractère, quel que soit le jeu auquel ils s’adonnent : les socialisateurs chercheraient avant tout le contact avec leurs partenaires, les tueurs à massacrer tout ce qui bouge, les performants à réussir les épreuves et à accumuler les récompenses, les signes de victoires (badges, or, etc.), les explorateurs à prendre connaissance du monde virtuel…

Ainsi nous explique Parkin, Bartle aurait constaté qu’un joueur adoptant le rôle d’un médecin dans un jeu de rôle afin de soigner les autres personnages aura tendance à exercer la même profession, quel que soit l’univers dans lequel il est impliqué.

Pour Parkin, cela montre que les jeux cherchent avant tout à révéler notre personnalité, le plaisir, le « fun » ne seraient pas la motivation principale du « gamer » – je suppose que cette théorie ne s’applique pas à Bubble Shooter ! Pour appuyer sa thèse, Parkin mentionne un travail de 2012, effectué par cinq psychologues, « The Ideal Self at Play : The Appeal of Video Games That Let You Be All You Can Be » (« Le Soi Idéal en jeu : l’attrait des jeux vidéo qui vous permettent d’être tout ce que vous pouvez être »). Ces chercheurs affirmeraient que les jeux vidéo les plus réussis sont ceux qui permettent au joueur d’incarner la version la plus satisfaisante, la plus épanouie de sa propre personnalité. « Les gens sont attirés par les jeux vidéo parce que ceux-ci leur offrent l’accès aux aspects idéaux d’eux-mêmes ».

Et Parkin de citer un propos de Bartle : « L’auto-actualisation se trouve au sommet de la hiérarchie des besoins de Maslow, et c’est cela que de nombreux jeux nous offrent… C’est tout ce que les gens désirent vraiment : être. »

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