L’Anglais comme langue pivot ou l’impérialisme linguistique caché de Google Translate – Frédéric Kaplan

Frédéric Kaplan (@frederickaplan), chercheur à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne, continue d’explorer le capitalisme linguistique de Google. Il s’est intéressé au fonctionnement de Google Translate, pour remarquer que l’outil de traduction de Google fonctionne toujours avec l’anglais comme langue pivot. Ce qui signifie que pour traduire un texte du français à l’italien, il passe d’abord par une traduction du français à l’anglais puis de l’anglais à l’italien. Forcément, ce procédé n’est pas sans générer de lourdes erreurs. Ce biais culturel n’est pas sans conséquences, car les traductions générées peuvent être utilisées comme sources primaires pour Google, par exemple pour son moteur d’autocomplétion.

“L’impérialisme linguistique de l’anglais a donc des effets beaucoup plus subtils que ne le laisseraient penser les approches qui n’étudient que la “guerre des langues”. Le fait de pivoter par une langue conduit à introduire dans les autres langues des logiques linguistiques propres et donc insensiblement des modes de pensée spécifiques. Il semble crucial d’inventer de nouveaux outils pour détecter et documenter ces nouvelles évolutions linguistiques.

Notons pour conclure que si l’anglais joue un rôle pivot pour les langues “européennes”, d’autres langues ont sans doute le même effet localement pour d’autres bassins linguistiques (Le Hindi par exemple). À l’échelle mondiale, c’est un réseau de chaines de traduction qui est en train de se mettre en place et qui impose parfois pour traduire une expression d’une langue à une autre de pivoter par une série de langues intermédiaires. Quand nous voyons les effets linguistiques d’un de ces pivots, imaginer des séquences de ces transformations linguistiques laisse songeur.”

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